Lors d'une précédente audition, le Pr Axel Khan avait rappelé que la viande était cancérigène et que cela s'expliquait par les phénomènes d'oxydation et de peroxydantion par les fers héminiques, « en particulier l'oxydation de la membrane nucléaire ».

La viande rouge est classée dans la catégorie IIa (agent probablement cancérogène) par le Centre international de recherche sur les cancers, tandis que les charcuteries sont classées dans la catégorie I (agent cancérogène pour l'homme) sur la base de données épidémiologiques. « Elle contient pourtant moins de fer héminique », poursuit le Pr Khan, « c'est ce qui m'a poussé à me pencher sur les sels nitrités ». Citant une métaanalyse menée sur le sujet, il ajoute que « sur 17 publications, 11 disent que les charcuteries nitritées sont plus cancérigènes chez l'homme que les charcuteries non nitritées, cinq disent qu'elles le sont autant, et une seule dit qu'elles le sont moins. »

Selon des résultats publiés par Fabrice Pierre et Denis Corbet, du laboratoire INRA TOXALIM de Toulouse, également auditionnés, la cancérogénicité liée aux charcuteries nitritées est différente de celle liée à la viande rouge. « Le grand phénomène chimique de la charcuterie nitritée est la formation de nitroso-hème ferreux, incroyablement stable et qui résiste à la cuisson, ajoute le Pr Khan. On en retrouve même dans les fèces. Il est quand même dégradé en partie et produit une cascade des produits de dégradation au contact direct de la muqueuse intestinale, et en particulier de la muqueuse colique. C'est ce qui explique le caractère très spécifique de la cancérogénicité des produits nitrités. »

Selon diverses évaluations également évoquées par le Pr Khan, on estime que 5 % des cancers du côlon, dans le monde, pourraient être dus aux charcuteries. « Mais on en mange beaucoup plus en France que dans d'autres régions du monde ! », prévient-il.