À l'ASCO cette année plusieurs études testant pour la première fois l'immunothérapie en oncopédiatrie ont été présentées. Trois essais de phase I-II testant des anti-PD1 (pembrolizumab et nivolumab) et l’anti-PDL1 (atezolizumab) dans les mélanomes, lymphomes et tumeurs solides ont été présentés.
Un réel bénéfice de l'immunothérapie dans les lymphomes de Hodgkin et tumeurs solides
Ces études sont venues confirmer que pour ces anticorps monoclonaux on peut se passer de phase I et attaquer directement en phase II en utilisant les posologies définies chez l'adulte après adaptation au poids. Ils montrent par ailleurs que parmi ces tumeurs, environ un tiers exprime PDL1. Enfin, leurs résultats mettent en évidence des taux de réponses intéressants et des réponses parfois très prolongées dans des lymphomes de Hodgkin, des gliomes malins et d'autres tumeurs solides (traditionnellement peu ou pas chimiosensibles) ainsi que chez celles qui, dans un contexte génétique, induisent un défaut de réparation de l'ADN (Constitutional MisMatch Repair Deficiency : CMMRD).
Des résultats prometteurs avec le pembrolizumab
La phase I-II pédiatrique consacrée au pembrozilumab (KEYNOTE-051) a été menée à la posologie fixe de 2 mg/kg 3x/semaine sur 35 cycles ou jusqu'à progression ou décision médicale d'interrompre, soit à la même posologie que celle validée (AMM) chez l'adulte. Aujourd'hui, alors que l'étude a été relancée au vu de ses résultats très positifs, 87 enfants de plus de 6 mois, avec un mélanome avancé, une tumeur solide ou un lymphome avancé en rechute ou réfractaire exprimant PDL1, ont été traités après sélection sur l'expression tumorale de PDL1(1). Ils sont issus d'une cohorte de 521 enfants dont 167 (32 %) avaient une tumeur exprimant le PDL1. Parmi ces 87 jeunes âgés de 1 à 17 ans (âge médian: 13 ans), deux tiers avaient une tumeur métastatique et plus d'un sur trois avaient déjà reçu au moins trois lignes de traitement pour une récidive ou une tumeur d'emblée métastatique. Ces tumeurs sont pour 68 % des tumeurs solides hors système nerveux central, 22 % des tumeurs du SNC et 7 % des lymphomes.
Sur ces 87 premiers patients, le taux de réponse au pembrozilumab est de 8 % avec 7 sur 87 patients ayant des réponses partielles (3 lymphomes de Hodgkin, 1 carcinome adrénocortical, 1 mésothéliome secondaire au traitement à l'âge de 1,5 an d'un neuroblastome par radiothérapie, 1 carcinome lymphoepithelial et 1 gliome malin) et le taux de stabilisation tumorale atteint 11 % (9 pts/87 pts).
La médiane de survie sans progression (PFS) est globalement de 1,9 mois et la médiane de survie totale est de 7,9 mois. Au terme de l'essai, plus d'un tiers des répondeurs bénéficiaient toujours du pembrozilumab. Et à 1 an, 8 % des patients sont toujours stabilisés et 36 % toujours en vie. Enfin, en terme de sécurité, la tolérance était plutôt bonne et on a enregistré 8 % d'effets secondaires graves (grade 3-4) dominés par les neutropénies (3 %) plus un arrêt de traitement pour effet secondaire grave (AST grade 3). En revanche, aucun décès lié au traitement n'est à déplorer.
Au vu de ces résultats très intéressants, le pembrozilumab a été quasi immédiatement agréé en pédiatrie par la FDA dans les lymphomes de Hodgkin et les tumeurs dans un contexte de déficience de réparation de mismatch (CMMRD). Et sur demande de la FDA, alors que le dossier est en cours d'examen en Europe, l'étude a été prolongée pour obtenir des données complémentaires.
Atezolizumab, Nivolumab : des données attendues
Les deux autres phases I-II testant un anti PDL1en pédiatrie, l'atézolizumab et l'autre anti-PD1 nivolumab, ont peu ou prou ciblé les mêmes tumeurs mais sans les sélectionner sur l'expression tumorale en PDL1 et en excluant les tumeurs cérébrales.
L'étude menée avec l'atézolizumab (2) a recruté 85 enfants dont 82 traités. Rétrospectivement, une fois exclus les lymphomes de Hodgkin (5 pts/85 pts), les tumeurs sont majoritairement des tumeurs "froides" sans lymphocytes infiltrants ni expression PDL1. Parmi les enfants traités, on a enregistré 5 % de réponses partielles (4pts/82 pts) : 2 lymphomes Hodgkiniens, 1 sarcome d'Ewing et 1 tumeur rhabdoide atypique. Ceci sans toxicité majeure.
L'essai testant le nivolumab, mené exclusivement aux USA, porte sur des enfants issus de cohortes (3). C'est ainsi qu'on a inclus 10 patients par cohorte de maladie. Et si l'on enregistrait une ou deux réponses, d'autres enfants de la cohorte étaient à leur tour inclus dans l'essai. Seuls les résultats portant sur les ostéosarcomes, les sarcomes d'Ewing et les rhabdomyosarcomes ont été présentés à l'ASCO. Ils ne montrent pas de bénéfice dans ces tumeurs. Mais d'autres résultats sont attendus.
Inhibiteur de TRK : succès total dans les cancers avec fusion de gènes
Le premier inhibiteur sélectif de récepteur de tropomyosine kinase (TRK), le larotrectinib (LOXO-101), a fait le buzz cette année à l'ASCO. À l'analyse intermédiaire, les résultats selon l’évaluation RECIST sont en effet extraordinaires puisqu'on est à 100 % de réponses chez l'adulte (étude de phase II NAVIGATE) comme chez l'enfant (étude de phase I-II SCOUT) dans les tumeurs associées à une fusion du gène de TRK (4). Pour mémoire, ces altérations sont rares et associées à une large gamme de tumeurs pédiatriques notamment les fibrosarcomes infantiles (IFS), les sarcomes à spindle-cell, les mésoblastomes rénaux congénitaux, les cancers thyroïdiens papillaires pédiatriques, les gliomes pédiatriques et les leucémies aiguës lymphoblastiques Ph-like. Résultat, le larotrectinib a été reconnu par la FDA comme "Breakthrough Therapy" et "Rare Pediatric Disease Therapy".
(1) Geoerger B. et al, Phase 1/2 KEYNOTE-051 study of pembrolizumab in pediatric patients with advanced melanoma or a PD-L1+ advanced, relapsed, or refractory solid tumor or lymphoma ASCO 2017; Chicago.
(2) Geoerger B. et al, A phase I/II study of atezolizumab in pediatric and young adult patients with refractory/relapsed solid tumors (iMATRIX-Atezolizumab).
(3) Davis KL. et al, ADVL1412: Initial results of a phase I/II study of nivolumab and ipilimumab in pediatric patients with relapsed/refractory solid tumors—A COG study. ASCO 2017, Chicago
(4) A pediatric phase I study of larotrectinib, a highly selective inhibitor of the tropomyosin receptor kinase (TRK) family.Larotrectinib (LOXO-101). ASCO 2017; Chicago
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