L’ÉLASTROGRAPHIE EST un outil complémentaire présent sur certains échographes et qui va aider à améliorer l’analyse des lésions mammaires. Cette technique repose sur la mesure de l’élasticité des tissus (module de Young). En effet, une lésion souple et mobile, est plutôt évocatrice d’une lésion bénigne, alors qu’une lésion dure et fixée peut laisser craindre une tumeur maligne. « Pour autant, l’élastographie n’est pas un outil destiné à être utilisé seul. On réalise l’échographie mammaire 2B habituelle, puis l’élastographie si nécessaire, pour aider au diagnostic d’une lésion. En outre, ces deux examens viennent en général en complément d’une mammographie au cours de laquelle une anomalie a été décelée : ils permettent de préciser le diagnostic et d’aider le médecin à prendre la décision de biopsier ou non la lésion ainsi analysée », précise le Dr Juhan.
Données qualitatives et/ou quantitatives.
La technique n’est pas nouvelle : depuis les années 1980, les propriétés d’élasticité des différents tissus sont étudiées, que ce soit par imagerie de déformation ou par l’intermédiaire de la propagation d’ondes. Ainsi, l’étude de l’élasticité a d’abord été utilisée pour l’exploration hépatique (notamment pour le diagnostic de fibrose), puis thyroïdienne, et maintenant mammaire et prostatique. Il existe, en outre, différents systèmes d’élastographie en fonction des constructeurs : avec certains appareils, il est nécessaire de faire des mouvements de pressions répétées avec la sonde sur la peau, alors qu’avec d’autres, il faut au contraire ne pas appuyer sur le sein avec la sonde. Certains donnent des renseignements qualitatifs (échelles de couleurs) et d’autres y associent des données quantitatives (en kPa). Comme Il existe différentes façons d’étudier l’élasticité d’une lésion en échographie, il est important de connaître les règles de bonnes pratiques de chaque système, pour obtenir une image de bonne qualité et informative.
Ainsi réalisée à la suite de l’échographie, l’élastographie ne prend pas plus de quelques minutes et les résultats sont immédiatement connus. L’analyse d’une anomalie mammaire en échographie permet de mieux la caractériser et la classer, en utilisant les critères définis dans la classification BI-RADS de l’ACR (Breast Imaging Reporting System and Data System). Cette classification, de 1 à 5, apprécie le caractère bénin ou malin d’une lésion. L’élastographie est surtout utile en cas de classement ACR3 (anomalie très probablement bénigne, à surveiller) ou ACR4 (anomalie indéterminée, à biopsier). En effet, elle permet alors d’améliorer les performances de l’échographie et notamment la caractérisation des lésions, afin de mieux les classer : ne pas surclasser une lésion en ACR4, et donc biopsier une anomalie bénigne ; et, à l’inverse, diminuer le taux de malignité dans les lésions ACR3 qui auraient pu être classées ACR4 et biopsiées.
Une étude multicentrique récente (1) montre qu’ainsi utilisée, l’élastographie permet de faire passer la spécificité de l’examen échographique de 61 à 78,5 %, sans changer la sensibilité.
Un autre intérêt serait de réduire la périodicité de surveillance des ACR3 ou de les reclasser en ACR2, mais bien que séduisante, cette piste n’a pas encore fait l’objet d’une démonstration et doit donc être réfléchie au cas par cas.
« L’élastographie est un outil très intéressant, mais qui n’est pas nécessaire et utile pour l’analyse de toutes les lésions. Il faut toujours interpréter les données élastographiques en corrélation avec l’analyse morphologique classique de l’échographie 2B, précise le Dr Juhan. Il faut savoir qu’il existe des lésions dures en élastographie qui sont bénignes, comme par exemple une cicatrice fibreuse, un fibroadénome hyalin ou calcifié, la mastopathie fibreuse (faux positifs). C’est pourquoi l’ensemble du dossier est nécessaire pour faire un diagnostic et déterminer une conduite à tenir (antécédents, facteurs de risques, données mammographiques, etc.). Il existe aussi quelques faux négatifs en élastographie comme les cancers « mous », car très cellulaires, ou des carcinomes in situ ».
Encore d’autres intérêts potentiels.
L’élastographie fait également l’objet d’études pour la détection des lésions : « il s’agit de passer la sonde sur le sein pour voir si une lésion est ainsi repérée, même s’il n’y a rien de visible en échographie 2B, explique le Dr Juhan. Cependant, pour l’instant, ce recours à l’élastographie à titre de détection, n’est absolument pas validé et demande donc la plus grande prudence ».
Enfin, « il semble que l’élastographie ait un intérêt pour évaluer la maturité du col pendant le travail. Des travaux sont en cours pour savoir si cette technique non invasive peut être utile dans l’induction du travail », conclut le Dr Juhan.
D’après un entretien avec le Dr Valérie Juhan, radiologue, service d’imagerie médicale, CHU La Timone, Marseille.
Liens d’intérêt : aucun.
(1) Berg W. Radiology 2012
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