« La France ne cédera rien de son action pour faire reculer le cancer des enfants », a déclaré Emmanuel Macron lors du lancement de la stratégie décennale de lutte contre le cancer, le 4 février dernier.
Celle-ci fait de la lutte contre les cancers de mauvais pronostics chez l'enfant une priorité. Elle se donne aussi comme objectifs l'amélioration de l'accès aux innovations diagnostiques et thérapeutiques, la promotion de la désescalade thérapeutique pour diminuer les séquelles, la mise en place d'un dispositif de suivi à long terme des patients ayant eu un cancer pédiatrique, la sensibilisation des professionnels au diagnostic précoce, ou encore l'incitation des industriels à développer des médicaments pédiatriques.
Encore 500 décès d'enfants par an
À l'occasion de la journée internationale contre le cancer de l'enfant, ce 15 février, de nombreuses voix s'élèvent pour saluer les progrès dans ce domaine ainsi que les orientations de la nouvelle stratégie, mais rappellent aussi le chemin qui reste à parcourir. Chaque année en France, 2 500 à 3 000 nouveaux cas de cancers surviennent chez les enfants ; si 80 % survivent à cinq ans, 500 jeunes en décèdent, ce qui en fait la deuxième cause de mortalité derrière les accidents domestiques. Les cancers les plus fréquents sont les leucémies (28 %), les tumeurs du système nerveux central (25 %) et les lymphomes (11 %) chez les moins de 15 ans, tandis que les lymphomes représentent près d'un tiers des cancers chez les adolescents.
« Il y a encore très peu de traitements spécialement développés chez l'enfant et les innovations doivent arriver le plus vite possible (...) On parle en permanence du fait que 80 % des cancers de l'enfant guérissent, mais certains ne guérissent pas. Il faut aussi analyser et partager les données pour améliorer la prévention, seulement 5 à 8 % des cancers pédiatriques sont d'origine génétique », rappelait dans nos colonnes Patricia Blanc, présidente de l'association Imagine for Margo.
Recherches sur les leucémies
L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris met en avant, pour cette journée, les recherches sur la thérapie par les CAR-T cells (Chimeric Antigen Receptor T-cells) dans le traitement des cancers de la moelle osseuse et des ganglions, notamment les leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) de l’enfant, de l’adolescent et de l’adulte jeune. Cette technologie recourt aux propres cellules immunitaires du patient, génétiquement modifiées afin de détruire des cellules tumorales. Une centaine de patients ont reçu une immunothérapie par CAR-T cells, avec des résultats « extrêmement encourageants » à l'hôpital Robert-Debré pour les moins de 18 ans et à Saint-Louis pour les jeunes adultes.
L'AP-HP promeut aussi le réseau national Conect-AML, coordonné par les Prs Arnaud Petit et Guy Leverger de l’hôpital Armand-Trousseau. Composé de pédiatres oncologues, de biologistes, de chercheurs et de représentants associatifs, il a pour objectif de développer la recherche sur les leucémies aiguës myéloblastiques (LAM), dont le pronostic chez l'enfant reste moins bon que celui d'autres sous-types de leucémies. Ces cancers, dont l'origine est un dysfonctionnement de la moelle osseuse, se caractérisent par la multiplication incontrôlée d’une catégorie de globules blancs immatures, les « blastes ».
Nouvelles pistes sur les tumeurs et lymphomes
De son côté, l'Institut Curie mise sur son centre SIREDO qui allie soins et recherche, et prend en charge quelque 350 jeunes patients chaque année. L'institut est notamment un centre référent pour la recherche sur les neuroblastomes, les sarcomes, le rétinoblastome, les tumeurs rhabdoïdes, les médulloblastomes et d’autres tumeurs cérébrales. « Pour aller encore plus loin, nous souhaitons créer, à horizon 2023, une entité de recherche dédiée à l’oncologie pédiatrique, et développant une recherche pluridisciplinaire sur ces tumeurs, annonce le Dr Olivier Delattre, pédiatre, directeur du centre SIREDO de Curie. Cette unité sera située tout à proximité des services de soins, un avantage pour déployer une recherche spécifique et innovante au plus près des besoins des jeunes patients ».
D'ores et déjà, le centre SIDERO explore de nouvelles stratégies de traitements épigénétiques contre des tumeurs rhabdoïdes (programme EpiRT), la caractérisation moléculaire complète des sarcomes d'Ewing pour aboutir à des immunothérapies spécifiques (projet Immuno-Ewing), ou encore le criblage de molécules sur les tumeurs pédiatriques (projets Dromos et Compass).
Optimiser les chimiothérapies
À Lyon, la journée internationale est l'occasion, pour l'Institut d'hématologie et d'oncologie pédiatrique (IHOPe) (Hospices civils de Lyon et centre Léon Bérard) de revenir sur la création en 2020 d’une nouvelle unité de modélisation. Dédiée à l’étude des traitements anticancéreux chez l’enfant et l’adolescent, elle se donne comme objectif d'optimiser les doses des chimiothérapies (qui restent le traitement principal) et de limiter les toxicités secondaires. « Les schémas d’administration de certaines molécules anticancéreuses chez l’enfant et l’adolescent restent, d’une certaine manière, empiriques car non fondés sur des relations pharmacocinétique/pharmacodynamique (PK/PD) établies », explique le Dr Pierre Leblond, pédiatre oncologue à l’IHOPe. Le projet devrait conduire à la création d’un logiciel de modélisation PK/PD et d’adaptation posologique des traitements.
Appels aux dons
Enfin, plusieurs institutions lancent des appels aux dons, comme l'Institut Gustave Roussy, dont la campagne Guérir le cancer de l'enfant au XXIe siècle intègre un axe supplémentaire destiné à financer la recherche sur le gliome infiltrant du tronc cérébral (GITC ou DIPG en anglais). La Ligue contre le cancer, premier financeur indépendant de la recherche (avec 3 millions alloués en 2020), entend soutenir la recherche oncopédiatrique en identifiant deux nouveaux appels à projet : les cancers réfractaires ou en rechute après traitement et les pistes thérapeutiques moins génotoxiques afin de limiter les risques de second cancer, un sujet qui figure aussi dans les priorités de la Fondation ARC.
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