Fréquemment pointés du doigt pour leurs effets indésirables, les écrans (télévision, smartphones, tablettes, jeux vidéo) ne doivent cependant pas être diabolisés, estime le Pr Carmen Schröder, pédopsychiatre et chef du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent au CHRU de Strasbourg.
Selon la spécialiste, "excepté avant l’âge de 3 ans où une exposition n’est conseillée qu’à titre exceptionnelle, les écrans peuvent être un moyen de découverte et de conquête, du monde comme de soi, lorsqu’ils sont bien utilisés".
Pendant la période de fragilité psychique de l'adolescence, ce qui peut sembler aux parents être un retrait peut faire, en réalité, office de protection pour leur enfant. "L’adolescent reste dans un univers qu’il domine, dont il connaît les règles", précise la pédopsychiatre. "Cela peut permettre à un adolescent aux prises avec ses conflits internes de calmer ses angoisses, voire participer à la construction de son identité", ajoute-t-elle. Ils permettent également à des adolescents timides ou complexés d’échanger avec leurs pairs. "Dans les jeux vidéo, la création d’un avatar peut booster un adolescent qui n’aimerait pas son physique, lui permettre de se sentir valorisé", souligne la professionnelle. En revanche, "lorsqu’un adolescent a une utilisation excessive de jeux vidéo en solitaire, cela doit alerter davantage les parents car ces jeux peuvent contribuer à l’isoler", fait remarquer le Pr Schröder. Enfin, ajoute la pédopsychiatre, "en cas de conflits intrafamiliaux, les réseaux sociaux permettent de ne pas se sentir seul, de garder un lien avec d’autres adolescents". À condition que ne fassent pas office d’amis uniquement des personnes que l’enfant ne connaît pas "et qui ne dévoileront d’eux que ce qu’ils veulent bien dévoiler", met-elle en garde.
Selon le Pr Schröder, il est donc préférable d'encadrer l'usage des écrans, en incluant l’adolescent dans cette démarche pour le responsabiliser et en échangeant avec lui sur ses activités, plutôt que de les supprimer. "Enlever un écran peut être vécu très violemment par l'adolescent car on le coupe de ses contacts sociaux", avertit-elle.
Par ailleurs, quel que soit l’âge, "les écrans permettent une ouverture sur le monde, grâce à une offre culturelle très importante", ajoute la spécialiste. À condition, toutefois, que l’adulte veille à ce que le visionnage soit adapté, en termes de contenu et de temps d’utilisation, et qu’il reste à la disposition de l’enfant pour discuter avec lui de ce qu’il a vu. Enfin, "ce sont des outils formidables d’apprentissage pour les enfants présentant des déficiences intellectuelles ou des troubles du spectre autistique", fait remarquer la spécialiste, selon qui "l’apprentissage s’appuyant sur les écrans peut être très adapté à leur fonctionnement".
Quid des risques d’addiction?
"Ils existent, mais ils ne sont pas aussi fréquents que les parents voire le médecin traitant peuvent le craindre", estime la pédopsychiatre. Selon le Pr Schröder, "dans la majorité des cas, on a plutôt affaire à des mésusages, même s’il existe bien des cas d’addiction, mais qui restent très rares". 3-6-9-12 Au final, la spécialiste se dit " assez adepte du 3-6-9-12* de Serge Tisseron". À savoir, "pas d’écran avant l’âge de 3 ans, puis une utilisation adaptée à chaque tranche d’âge avec des échanges réguliers entre les parents et leurs enfants sur ce qu’ils font sur l’écran, ce qu’ils regardent", ajoute le Pr Schröder. "À condition, bien sûr, que les parents montrent l’exemple en n’étant pas eux-mêmes systématiquement collé à un écran", conclut-elle.
*Apprivoiser les écrans et grandir (www.3-6-9-12.org)
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024