Quand la kiné fait mal !

La douleur induite par la kinésithérapie dans les pathologies ostéo-articulaires est insuffisamment prise en charge

Publié le 20/02/2014
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Un meilleur accompagnement antalgique des séances pourrait être utile pour améliorer la...

Un meilleur accompagnement antalgique des séances pourrait être utile pour améliorer la...
Crédit photo : BSIP

Le but de l’étude ALTO, étude nationale, menée chez 700 patients, chez lesquels une rééducation ostéo-articulaire a été prescrite par le médecin généraliste, a été d’abord de rechercher la présence de douleurs induites par la kinésithérapie et d’évaluer la prise en charge de ces douleurs.

Dans un second temps, la kinésiophobie ou peur du mouvement menant à l’évitement de la situation redoutée, a été recherchée par l’échelle TSK donnant un score de kinésiophobie permettant de déceler les patients dont l’intensité de la douleur induite par le mouvement n’est pas corrélée avec les signes objectifs observés. Puis l’impact de cette kinésiophobie sur cette rééducation et des facteurs principaux associés à cette kinésiophobie ont été analysés. Il apparaît que la kinésithérapie est un acte douloureux avec des douleurs induites fréquentes puisqu’à la 5e séance, la kinésithérapie est considérée comme douloureuse par 68 % des patients, provoquant soit une augmentation de la douleur préalable, voire même une apparition d’une nouvelle douleur.

Un traitement antalgique dans seulement un quart des cas

Ces douleurs induites sont insuffisamment prises en charge avec un traitement antalgique spécifique prescrit pour ces douleurs chez seulement 26 % des patients, alors que cette prise en charge pharmacologique de la douleur induite augmente l’adhérence aux séances de kinésithérapie (p = 0.034) et augmente la satisfaction des patients (p = 0.02). Il est intéressant de noter que les facteurs associés à la prise en charge spécifique des douleurs induites par la kinésithérapie dépendent surtout de la réalisation en post-thèse d’un cursus sur la douleur par le médecin généraliste (Odds Ratio 2.65 ; [1.29-5.43] ; p = 0.008) ainsi qu’à la présence d’un traitement de la douleur par des antalgiques avant la consultation chez le médecin généraliste. Les facteurs associés à la kinésiophobie des patients étaient la kinésiophobie du médecin, le type de douleur essentiellement aux mouvements, le niveau de douleur, en particulier inacceptable et le genre du médecin (homme : OR = 1.65 ; [1.02-2.65] p = 0.040). Alors même que les patients kinésiophobes ont en général plus de séances de rééducation, ils sont moins satisfaits en fin de programme par rapport aux non kinésiophobes.

En conclusion, la kinésithérapie est un soin douloureux en pathologie ostéo-articulaire (68 % des cas) et l’existence d’une kinésiophobie sous-jacente chez le patient est un élément important à prendre en compte pour la prescription de rééducation ostéo-articulaire. Un score élevé de kinésiophobie est associé dès l’inclusion à plus de douleurs et à une moindre activité, mais également à plus de douleurs induites par la kinésithérapie avec une réduction de la satisfaction des patients pour ces soins. La kinésiophobie du patient est également liée à la kinésiophobie du médecin. Une formation spécifique autour de cette notion de kinésiophobie, mais également du meilleur accompagnement antalgique des séances pourrait donc être utile pour améliorer la satisfaction de ces prescriptions.

D’après la communication du Pr Serge Perrot, Paris
Dr Rose Marie Javier, Strasbourg

Source : Congrès spécialiste