Rejoignant le mouvement initié par l’UNAPL contre le projet de loi « croissance et pouvoir d’achat », les généralistes qui se sont mobilisés le 30 septembre ont sans doute autant témoigné de leur ras-le-bol quotidien que de leur inquiétude quant aux conséquences qu’aurait une ouverture du capital des sociétés d’exercice libéral à des investisseurs étrangers. Combien étaient-ils ? Selon les estimations de Michel Chassang, président de l’UNAPL, 70 % des cabinets médicaux étaient mobilisés lors de cette « journée sans professionnels libéraux ». Un chiffre confirmé par Luc Duquesnel, président de l’UNOF, concernant les généralistes de Mayenne, son département. Pour le reste, il assure que « le taux de mobilisation était supérieur à 50 % dans de nombreux secteurs ».
Si Claude Leicher a constaté qu’il y avait beaucoup de monde localement, le président de MG France ne s’est risqué à aucune estimation, rappelant que « les choses se sont décidées très tard ». Présent lors du cortège parisien des pharmaciens, Jean-Paul Hamon, président de la FMF, reconnaît que le nombre de médecins mobilisés était « variable ». Au ministère de la Santé, sans donner de chiffres, on reconnaît l’importance de la mobilisation.
Une chose est sûre pour Claude Leicher : « On a saisi l’occasion du 30 septembre pour indiquer les problématiques des généralistes ». Ce que confirme un généraliste de la région lilloise qui préfère rester anonyme et pour qui les généralistes se sont, comme lui, joints à la manifestation des autres professionnels de santé car elle constitue « une caisse de résonance aux problèmes de la santé en libéral ». Abondant en ce sens, Luc Duquesnel voit dans ce ralliement des généralistes la prise de conscience des risques suscités par les lois Macron et Touraine à l’encontre des médecins et, plus encore, l’expression d’un « malaise profond » des généralistes.
« Nous avons été oubliés »
Refonte du système de soins de proximité, projet d’instauration du tiers payant généralisé, absence de revalorisation du C, les sujets de préoccupations des généralistes n’en finissent plus. Comptant parmi les grévistes, Jenny Battner, généraliste parisienne, pointe les difficultés du travail médical et médico-social, qui n’est ni encouragé ni valorisé par les pouvoirs publics. Installée dans un quartier populaire de la capitale depuis plus de 23 ans, elle rappelle que les généralistes sont « un relais nécessaire auprès de la population pour la prévention : nous voyons exactement ce que les gens vivent au quotidien et pour toutes ces raisons nous avons été oubliés ». Telle que prévue dans la loi Santé, la redistribution des rôles entre les acteurs de santé inquiète aussi, à plus d’un titre, les praticiens . Pour le médecin nordiste, l’une des difficultés de la délégation des tâches réside dans l’absence de communication entre les professionnels. « Quand on délègue un vaccin pour la grippe, on ne sait pas, aujourd’hui, quel patient s’est réellement fait vacciner, on n’a pas de retour. »
Alors même que le parcours de soins semble être le leit-motiv des politiques publiques de santé, il affirme qu’un tel processus n’existe pas actuellement?: « il y a des patients qui changent de médecin traitant tout le temps, il suffit d’un clic sur internet ». Et, pour lui, les déclarations confortant les généralistes comme pierre angulaire du système ne reflètent pas la réalité. « Si les généralistes étaient valorisés, si la Sécurité sociale avait confiance en eux, elle ne mettrait pas en place Sofia », du nom du service d’accompagnement des maladies chroniques mis en place par l’Assurance Maladie.
« On a tellement de revendications »
Installé à Colmar, le Dr Aviezra Bercot dresse un rapide bilan de la situation des généralistes : « on est envahi par la paperasse, par les normes sur l’accessibilité, par la ROSP, on n’a pas de revalorisation, la situation des médecins n’est pas extra ». Lui n’a pas manifesté mardi « pour ne pas être assimilé aux pharmaciens, aux huissiers… », par peur des amalgames. Mais il se dit prêt à rejoindre les rangs d’un cortège de médecins, initié par des médecins, pour des médecins. « On a tellement de revendications, confie-t-il, qu’on ne sait plus par où commencer… Mais il faudrait quand même commencer par le C, ça fait un moment qu’il est bloqué. »
Au cœur des réclamations portées par les différents syndicats, cette question de la revalorisation échauffe les esprits, Marisol Touraine n’ayant laissé dimanche sur France Inter aucun espoir sur le sujet. De l’avis de Luc Duquesnel, voilà qui laisse entrevoir la montée d’une situation explosive, une situation similaire à celle de 2002, estime le syndicaliste.
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