L’humour noir face aux déserts médicaux. Pour dénoncer la situation « catastrophique » des urgences dans la Nièvre, plusieurs communes de ce département, impacté par la pénurie médicale, ont pris des arrêtés symboliques « interdisant » à leurs habitants de se faire porter pâle. « Il est formellement interdit à tout habitant de tomber malade, sous peine de ne recevoir aucune prise en charge médicale en raison de la fermeture répétée des services d'urgences », peut-on lire dans l'arrêté grinçant pris par Decize, une commune de 5 600 habitants.
Les urgences de l'hôpital de ce gros bourg « ont été placées en mode dégradé voire complètement fermées à 24 reprises depuis mars », souligne Justine Guyot, la maire socialiste de la commune. Pire encore, à une reprise, les urgences de l'hôpital de Nevers, à 40 minutes de voiture, étaient elles aussi fermées. « Il n'y avait alors aucun service d'urgences dans toute la Nièvre », qui compte 200 000 habitants. « Je voulais donc interpeller » ajoute-t-elle, en prenant cet arrêté « ironique » le 8 octobre, adressé à l'ensemble des communes de la Nièvre.
Depuis, « une vingtaine » d’édiles ont copié cette démarche, comme celui de Montigny-aux-Amognes. La Nièvre, « c'est une catastrophe », résume Christian Perceau, maire de ce village de moins de 600 habitants. « On a d’énormes soucis avec les urgences à Nevers. C'est géré par le 15 à Dijon », la capitale régionale à environ 2 h 30 de route, « mais il y a des erreurs… », souligne le maire.
Pont aérien
De fait, la Nièvre ne compte que 68 médecins pour 100 000 habitants contre une moyenne de 121 en France. Il n'y a pas de dermatologue, un seul rhumatologue, un allergologue... et 20 % des patients n'ont pas de médecin traitant. La situation est telle qu'un « pont aérien » a été mis en place en janvier 2023 afin d'amener depuis Dijon, une fois par semaine au moins, un maximum de huit médecins à l'hôpital de Nevers. En mars, un collectif d'urgentistes de Nevers avait averti que la sécurité des patients n'était « plus assurée », les urgences tournant avec six praticiens, alors que 27 seraient nécessaires.
Ce n’est pas la première fois que des édiles prennent ce genre d’arrêtés symboliques. En 2018 déjà, Marc Ducom, maire d'Ychoux, petite commune des Landes, avait annoncé son intention de prendre un arrêté pour interdire à ses concitoyens de tomber malades. Pour le maire, c’était la seule façon de faire « le buzz » pour attirer de futurs médecins.
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