Spécial Rencontres de la cancérologie française

L’appli-chimio aide à détecter la survenue d’effets indésirables

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Publié le 15/12/2016
L’appli chimio a été présentée par le Dr Maya Guttierez (Cf. photo), oncologue médical à l’Institut Curie, Saint Cloud lors du workshop sur « la e-santé : nouveaux outils pour la maîtrise des risques et la coordination ville-hôpital » lors des RCFR 2016*. Il s’agit d’une appli interactive pour la gestion des effets secondaires des traitements antitumoraux par administration orale.
visuel appli-chimio

visuel appli-chimio
Crédit photo : arnaud janin

Une appli pour signaler les effets indésirables des patients sous traitement antitumoral, c'est l'idée des acteurs publics dans la région Ile-de-France. Ce programme de télésurveillance s’inscrit dans le cadre de la télémédecine pour les patients recevant à leur domicile un traitement antitumoral oral. Il est financé par l’ARS Ile-de-France dans le cadre d’un projet de télémédecine appliqué aux maladies chroniques. Dans cette région, les acteurs publics ont la volonté de monter une plateforme Ortif** qui contient différents projets médicaux. La maîtrise d’ouvrage est réalisée par le GCS Sesam***.

Evaluer ses symptômes à son domicile

Quel est le mode opératoire de cette appli ? Le patient évalue quotidiennement ses symptômes à son domicile. Un algorithme génère des alertes qui sont transmises de façon optimisée au réseau de santé proche du domicile du patient ou au service d’oncologie en fonction de la gravité de l’alerte et du parcours de soins du patient. L’objectif est de donner une réponse graduée à l’alerte. Concrètement, le projet est mené de façon expérimentale sur trois ans. La première année qui se termine consiste à créer l’application après une phase d’appel d’offres dans le cadre d’un marché public. La partie validation de l’appli qui consiste à tester la concordance de l’algorithme sur une centaine de patients commence au courant du mois de décembre 2016. Ensuite, la validation pourra être réalisée à partir d’une étude multicentrique de 400 patients en France, dont 50 % sont issus des déserts médicaux. La volonté de l’ARS en effet est de réduire les inégalités de santé sur les territoires. En résumé, une évaluation double sera réalisée, à la fois en termes de cliniques et sur le plan médico-économique à partir du deuxième trimestre 2017.

Symptom tracker

Que contient le questionnaire patient ? Il s’agit d’un symptom tracker. Les questions sont posées en fonction du traitement que prend le patient. Le professionnel de santé paramètre l’application qui choisit parmi une soixantaine de molécules. Le but est en effet de ne présenter au patient que les effets secondaires les plus fréquents ou moins fréquents mais possiblement sévères. Pour chaque molécule prescrite, il y a une dizaine de symptômes. Et si le patient présente un symptôme qui ne figure pas dans la liste adaptée à sa molécule, il peut aller chercher dans la liste globale des symptômes disponibles (une trentaine recensés pour l’instant). Une fois que le patient a rempli la liste de ses effets secondaires, l’algorithme tient compte de la durée du symptôme dans le temps, c’est-à-dire le nombre de jours où ce dernier est présent, son intensité, sa fréquence de survenue et sa répercussion sur sa vie quotidienne. L’objectif de cette recension de données est d’établir une évaluation objective, mais aussi une vision subjective sur la qualité de vie. Si l’on connaît l’état du patient lors de son inclusion, à savoir par exemple s’il est nauséeux, il en sera tenu compte dans l’algorithme. Le patient peut aussi comparer son état par rapport à un jour précédent.

Feux vert, orange et rouge

A partir de ce questionnaire seront calculés des grades de toxicité, des scores et des feux à même de générer des alertes (vert, orange ou rouge). Avec un feu vert, le patient peut continuer son traitement et ses effets secondaires ne sont pas inquiétants. Aucune alerte n’est lancée et le patient peut rester à son domicile. Celui-ci pourra consulter du contenu sous forme de règles hygiéno-diététiques et sous forme de niveau 1 ou 2 de médicaments (avec le niveau 1 le médicament a été inefficace ou alors le patient présente une contre-indication au traitement médical de niveau 1). Un feu orange présente quant à lui des alertes qui contraignent les patients à consulter dans les 72 heures. Ces patients reçoivent des alertes mais pas avec une obligation d’urgence absolue. Par exemple, si l’alerte apparaît le week-end, le patient peut attendre le lundi pour consulter. Pour autant, cette alerte ne représente pas une indication à baisser les doses ou à changer le traitement, tant que le feu ne passe pas au rouge. Et lorsque l’alerte passe au rouge, il devient nécessaire de diminuer le traitement, voire de l’arrêter. Celle-ci est transmise au service hospitalier qui participe à l’expérimentation et qui doit rappeler le patient dans les quatre heures. Pour autant, le patient n’a pas forcément à se rendre à l’hôpital. C’est la consultation téléphonique qui le dira.

Eviter que le patient attende pour signaler ses EI

Au final, l’objectif est d’éviter de passer au rouge. Les patients avec ce type de traitement souffrent de toxicités peu sévères. Car ils n’ont pas toujours conscience de leur degré de toxicité, et peuvent attendre trop avant de signaler les effets indésirables. L’appli permet donc avec le feu vert de conserver le patient à son domicile, avec le feu orange de l’envoyer consulter en ville et avec le rouge à l’hôpital.

 

 

* Les Rencontres de la cancérologie française 2016 ont eu lieu du 13 au 14 décembre 2016 à Paris.

** Ortif est un service de télémédecine permettant d’échanger de manière sécurisée de l’imagerie, des données médicales et de réaliser des visio-consultations. Il est inscrit dans le programme régional de télémédecine piloté par l’ARS Ile-de-France. Il est piloté par le maître d’ouvrage régional en e-santé, GCS Sesan. 

*** Sesan ou Service numérique de santé est l’expert opérationnel en systèmes d’information pour les acteurs de santé franciliens.


Source : lequotidiendumedecin.fr