TENTER de parler de cette pièce extraordinaire est toujours se trouver en dessous de la réalité, de sa puissance poétique et analytique. Comme le dit Georges Lavaudant, qui reprend ce spectacle dix ans après en avoir donné une première version, avec les mêmes comédiens, à une exception près, la pièce « raconte la réflexion acharnée et le désir lucide d’un jeune homme de 20 ans, de se réapproprier cinquante ans après, un événement historique qui a absolument bouleversé toute l’Europe ».
Le jeune Büchner connaît la France. Il vit à Strasbourg. Il se documente, accomplit un véritable travail d’historien et compose ce grand ouvrage. On y entend tous les « personnages » de la Révolution française dans leur vérité terrible. C’est le 31 mars 1794 que Danton et un certain nombre de ses partisans sont arrêtés. Ils seront guillotinés quelques jours plus tard, le 5 avril. Robespierre et Saint-Just, instruments de ces crimes, le seront le 28 juillet suivant.
Dans cette pièce, les personnages sont justement Robespierre (Gilles Arbona), Saint-Just (Frédéric Borie), Camille Desmoulins (Fabien Orcier), Hérault-Séchelles (François Caron), Collot d’Herbois (Jean-Michel Cannone), pour n’en citer que quelques-uns, et les femmes, bien sûr, essentielles, Lucile (Julie Pouillon), Julie (Anne Sée). Mais c’est aussi à des femmes imaginées que Büchner donne la parole. Ainsi Marion (Astrid Bas), la prostituée, qui, en un récit puissant, donne, selon le metteur en scène, « l’antimanifeste discret et fabuleux d’un art d’exister et de penser dont nous n’avons pas encore mesuré tous les effets ».
Métaphysique.
C’est une tragédie que peint Büchner, c’est une tragédie que met en scène Georges Lavaudant. Un grand plateau nu, très peu d’éléments de décors, un rideau brechtien pour ces étranges intermèdes spectaculaires qui sont la sève de l’ouvrage. De beaux costumes, de belles lumières, un mouvement vif de la représentation. Un peu de piano, des chants, pas trop de musique mais le son terrible de la guillotine et le rideau qui tombe sur chaque scène dans un frottement inquiétant.
L’équipe est très bonne, le jeu ferme. On devine qu’une lente maturation a donné à chacun une intelligence nouvelle de chaque personnage et de la situation. Mais il faut saluer plus particulièrement Patrick Pineau, remarquable dans l’humanité inquiète, dans la lucidité, le désespoir. C’est une œuvre métaphysique qu’a composée Georg Büchner. Si le sang coule, si le sang gicle, c’est bien le sens de l’existence qui est en question. Plus que l’avenir de l’Humanité, plus que la question politique, présente bien évidemment, c’est la question de la solitude de l’homme face à son destin et à l’ultime pas jusqu’à la mort, que pose Georg Büchner. Que se pose Danton au moment de mourir. Superbe.
MC93 de Bobigny (tél. 01.41.60.72.72, www.mc93.com), lundi, vendredi, samedi à 20 h 30, mardi à 19 h 30, dimanche à 15 h 30. Relâche les mercredi et jeudi. Durée : 3 heures (1 h 30, entracte de 20 minutes, 1 h 10). Le dimanche 25 mars, représentation en audiodescription. Jusqu’au 1er avril. Rencontre avec l’équipe artistique le samedi 24 mars à 17 h 30.
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