Une radicalité intéressante

LE COLLECTIF Les Possédés, sous l’autorité de Rodolphe Dana, donne une forme théâtrale âpre à une histoire que le romancier Laurent Mauvignier avait d’abord élaborée pour un scénario de cinéma, avant d’y renoncer. Cette forme a été trouvée lors d’un séjour commun de huit jours au théâtre Garonne de Toulouse.

Il y a devant nous un « objet » très cohérent, aussi désarçonnant que cohérent. La violence épouvantable de la famille, telle qu’elle est montrée, secoue. Toute famille et, en même temps, une famille unique. Avec une histoire très particulière : une enfant disparue dix ans auparavant, surgit. Elle avait 5-6 ans, elle en a 15-16. À la fin éclatera la douleur furieuse de la mère. Ici, les morts et les vivants peuvent se parler… Mais une disparue qui revient, une enfant dont la disparition – et entendons aussi la mort supposée – a littéralement « formatée » la famille, qui s’est construite sur cet impossible deuil. Cette disparue, elle, ne peut prendre la parole sans scandaliser…

À la radicalité d’une histoire qui demeure volontairement irrésolue, répond celle de la forme. Quelque chose de laconique… et pourtant éloquent. D’ailleurs, les personnages parlent beaucoup. Mais sans rien jamais expliquer. On est précipité au cœur de cette famille. Rodolphe Dana, qui dirige le collectif, évoque Jean-Luc Lagarce. Et ce n’est pas faux : on y pense.

Mais Mauvignier a sa personnalité, forte, sans peur. Personnages : le grand-père, Simon Bakhouche, le père, David Clavel, le fils, Julien Chavrial, la mère, Marie-Hélène Roig et la jeune Elise, Émilie Lafarge. Unis dans le ton, chacun avec ses nuances. Unis pour porter cet objet violent, troublant, insolite et théâtral.

La Colline (tél. 01.44.62.52.52, www.colline.fr), petite salle, à 21 heures du mercredi au samedi, mardi à 19 heures, dimanche à 16 heures. Durée : 1 h 15. Les samedis 8 et 15 décembre à 16 et 21 heures. Tournée suit en 2013. Texte aux éditions de Minuit.