À Toulouse puis en tournée, « l’Oiseau vert »

Une féerie pleine d’ironie

Publié le 05/03/2015
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Crédit photo : POLO GARAT

Théâtre

On connaît mieux Carlo Gozzi (1720-1806) par « l’Amour des trois oranges » : il n’en restait rien, seulement les souvenirs de l’écrivain, lorsque Meyerhold suggéra à Prokofiev d’en faire un opéra. Laurent Pelly a d’ailleurs monté l’ouvrage et il rêvait depuis des années d’aborder « l’Oiseau vert ». Certains spectateurs se souviennent sans doute de la miraculeuse mise en scène de Benno Besson dans une scénographie magique de Jean-Marc Stehlé.

Il s’agit en quelque sorte d’une fable féerique et philosophique, pas simple à représenter, car on y voit des pommes qui chantent, de l’eau qui danse, des statues qui parlent et se métamorphosent, un palais qui surgit en un éclair et bien sûr un oiseau qui s’exprime et agit. Agathe Mélinand, codirectrice du Théâtre national de Toulouse, collaboratrice essentielle de Laurent Pelly sur les scènes lyriques et théâtrales, signe une nouvelle traduction, qui rend compte des styles différents dont use Gozzi. Les acteurs s’en emparent avec alacrité.

Comme à son habitude Laurent Pelly signe la scénographie, les costumes, et s’appuie sur les lumières de Michel Le Borgne. Le metteur en scène aurait pu résoudre tous les problèmes avec de la vidéo. Mais il préfère des moyens artisanaux. Dix techniciens vêtus de noir, visibles sur les côtés, se chargent de la manipulation et cela ajoute à la magie colorée de la représentation. L’espace est un immense plan incliné entouré d’ampoules, qui bouge et se transforme. Les éléments scéniques (lustres, grands cadres, etc.) suggèrent les lieux différents.

L’essentiel repose sur les comédiens, particulièrement bien choisis et qui défendent leurs personnages avec esprit. Le ton dominant est burlesque, ironique et l’on rit beaucoup. L’histoire ? Une méchante reine (Marilu Marini, extraordinaire silhouette et voix grinçante) a jeté sa belle-fille (Fabienne Rocaboy) dans un cul-de-basse-fosse (sous l’évier !) et voulu faire tuer ses enfants jumeaux (Thomas Condemine, Jeanne Piponnier). Pantalone (Eddy Letexier) les a sauvés et ils ont été recueillis par un charcutier et sa femme (Georges Bigo et Nanou Garcia). Dix-huit ans plus tard, leur père, le roi (Emmanuel Daumas), pense encore à eux. L’Oiseau vert (Mounir Margoum) veille. Ajoutons le poète flagorneur (Pierre Aussedat) et les statues qui s’expriment (Alexandra Castellon, Régis Lux).

On suit ces aventures haletantes, cocasses, féroces, miraculeuses avec un regard d’enfant. La direction d’ensemble est fine et les comédiens déploient une énergie cocasse et touchante à la fois. Un divertissement, mais aussi une pièce qui a du sens et touche.

Théâtre National de Toulouse (tél. 05.34.45.05.05), jusqu’au 21 mars. Puis en tournée à Albi (28 au 28 avril), Grenoble (5-9 mai), Rennes (19 au 19 mai), Printemps des Comédiens de Montpellier (12 au 12 juin), Caen (23 au 23 juin). Le texte de la pièce et un dossier documentaire sont publiés par « l’Avant-Scène Théâtre » (12 euros).

Armelle Héliot

Source : Le Quotidien du Médecin: 9392