« Kiki de Montparnasse », par Héloïse Wagner

Une égérie des années 1920

Publié le 03/09/2015
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Héloïse Wagner est Kiki

Héloïse Wagner est Kiki
Crédit photo : J.-J. BEINEIX

Elle était née en Bourgogne en 1901 et mourut en 1953. Elle s’appelait Alice Prin. Jeune, elle était splendide, photos et tableaux en témoignent. Elle pose pour Mendjiski, Modigliani, Foujita, elle est la femme violon de Man Ray et on l’aperçoit dans de nombreux films des années 1920-1930. Très tôt, elle écrivit ses souvenirs, mais ils n’ont été publiés que des années plus tard.

Il y a très longtemps qu’est né le projet d’Héloïse Wagner, mais le hasard des programmations fait qu’il y a trois spectacles inspirés des mémoires de Kiki de Montparnasse à Paris ces temps-ci. Au Guichet Montparnasse, une adaptation et interprétation de Françoise Taillandier avec Ben Devie, Laurent Groff en voix off et Paul Hautreux au piano (reprise du 5 septembre au 7 novembre, chaque samedi à 22 heures) ; à la Huchette, une « fantaisie musicale » d’Hervé Devolder, avec dans le rôle de la muse-chanteuse une interprète qui a du tempérament, Milena Marinelli, accompagnée au piano par Ariane Cadier (à 21 heures du mardi au vendredi, à 16 heures samedi, en relâche jusqu’au 14 septembre).

Plus élaboré, plus sophistiqué est le « Kiki de Montparnasse » interprété par l’excellente Héloïse Wagner, qui joue et chante et possède la séduction et l’alacrité du personnage. Elle en rêvait depuis des années, cette enfant de la balle. Son père, musicien, Reinhardt Wagner, a composé de beaux airs pour des paroles sur mesure de Frank Thomas, un maître en la matière. Et c’est Jean-Jacques Beineix, qui avait déjà dirigé Héloïse Wagner dans « Cinq filles couleur pêche », d’Alan Ball, qui signe la mise en scène.

Le cinéaste a reconstitué l’atelier d’un peintre. Au fond, un très grand écran diffuse des images vidéo très travaillées par Christian Archambeau et qui permettent d’aller au-delà des murs. Elles ne sont jamais platement illustratives, mais sont comme un récit qui doublerait le premier. C’est fait avec grand soin, comme le sont les lumières, signées Pierre Befve et Beineix, qui dirige la comédienne en mettant en valeur sa sensualité heureuse. Le récit est cadré avec simplicité et l’on suit avec émotion la vie de cette paysanne devenue modèle et compagne des peintres de Montparnasse, inspiratrice de Man Ray. Épisodes heureux, épisodes tragiques se succèdent. Au fond du plateau, Rémi Oswald (en alternance avec Jean-Yves Dubanton) à la guitare et Rodrigue Fernandes à l’accordéon accompagnent les chansons, très jolies et mélancoliques, qui disent bien l’électrisante Kiki.

Lucernaire, à 21 h 30 du mardi au samedi. Un CD des chansons est publié chez Milan. Tél. 01.42.22.66.87, www.lucernaire.fr.
Armelle Héliot

Source : Le Quotidien du Médecin: 9429