Robinson, voyage intérieur

QUELQUES JOURS encore ! Quelques représentations d’un spectacle unique qui n’a cessé, depuis sa création au festival d’Avignon, il y a deux étés, de revivre devant des publics très divers. Que vous connaissiez le lien particulier qui unit l’écrivain Olivier Cadiot, le metteur en scène Ludovic Lagarde et le poète des tréteaux qu’est Laurent Poitrenaux, ou non, vous dégusterez avec gourmandise cet étrange monologue.

Seul, tout de blanc vêtu, étirant son corps comme un long chat, Laurent Poitrenaux raconte l’univers intérieur, les vertiges de ce « mage », qui avoue assez rapidement qu’il n’est pas si magique que cela. En 1997, « le Colonel des Zouaves » marquait la première collaboration du trio. Il s’agissait déjà d’une forme très fascinante et neuve de récit et de performance, d’humour toujours et de sophistication souvent. Il y a deux ans, Olivier Cadiot, artiste associé au festival, avait donc présenté, au théâtre municipal, cet objet étonnant sorte de suite du « Colonel ». Le « héros », Robinson-Poitrenaux, nous entraînait dans les replis de son cerveau. À l’origine, le voyage durait deux heures. Parfois on en perdait le fil, mais la salle du théâtre municipal avait été subjuguée. Aujourd’hui, la traversée n’excède pas une heure quinze et l’on gagne en jubilation.

Pas de décor, mais un travail sur les images et sur le son de l’IRCAM, qui sont, disons-le, « magiques ». Et puis il y a la grâce longue et dansante de Laurent Poitrenaux, applaudi l’été dernier et toute cette saison dans « Jan Karski », mis en scène par Arthur Nauzyciel. Il y a la gravité et la fantaisie d’Olivier Cadiot, le doigté sûr et léger de Ludovic Lagarde. À la fin, on crierait bien « Bis ! », mais l’interprète est épuisé par ce travail unique. Lisez les livres de Cadiot, ils sont à la librairie du théâtre. Et vous retrouverez Laurent Poitrenaux cet été dans « la Mouette » à Avignon et plus tard dans les trois grandes pièces de Büchner, mises en scène par Ludovic Lagarde.

Théâtre du Rond-Point (tél. 01.44.95.98.21, www.theatredurondpoint.fr), à 21 heures, de ce soir au 3 juin en matinée. Durée : 1 h 15. Les textes d’Olivier Cadiot sont publiés chez POL.