IL Y A, au cœur de la représentation de « la Trilogie de la Villégiature » telle que la déploie délicatement Alain Françon, une scène qui dit tout l’art de Carlo Goldoni et toute la qualité de son regard sur le monde. Brigida (Elsa Lepoivre) et Paolo (Éric Ruf), les domestiques, prennent un moment de répit avec leurs camarades à l’orée de leur longue journée de travail. On apprend que, chaque matin, c’est chez l’un ou chez l’autre qu’a lieu cette délicieuse cérémonie fraternelle de partage d’un petit chocolat ou d’un petit café. Il n’y a que tendresse et estime dans cette scène superbement réglée et interprétée.
Ce moment est exemplaire. Il dit l’œuvre, il dit la manière dont elle est remarquablement traduite par Myriam Tanant, elle dit la délicatesse de la manière d’Alain Françon, elle dit la hauteur magnifique de l’interprétation. Préparatifs, séjour, retour : la petite bourgeoisie provinciale se doit d’aller en vacances, comme l’aristocratie. Et ce ne sont que dépenses et chamailleries, gourmandises, rivalités dérisoires, amours heureuses ou contrariées. La vie même !
On sourit devant les nostalgiques qui prétendent que la mise en scène de Giorgio Strehler était beaucoup plus ci, beaucoup plus ça. On s’en souvient et l’on n’oublie pas les interprètes d’alors. Mais on est neuf devant la production superbe de l’actuelle Comédie-Française, qui se donne dans la nouvelle salle, le Théâtre éphémère. On y est très bien assis, avec une visibilité excellente. Quelques réglages acoustiques sont encore à prévoir, ce qui est normal au moment de la mise en service d’un « instrument » de travail, mais, pour l’essentiel, l’écoute est parfaite.
Ici, il faudrait analyser le travail de chacun, l’inventivité et la rigueur de chaque interprète pour chaque personnage dans les beaux atours de Renato Bianchi et la scénographie harmonieuse de Jacques Gabel et les lumières de Joël Hourbeigt. La générosité italienne de Bruno Raffaelli dans un spectacle qui peut faire penser, par-delà Goldoni l’enchanteur, à Regnard ou Lesage. Saluons la sagesse sobre d’Hervé Pierre, la profondeur déchirante de Guillaume Gallienne, l’énergie inquiète de Laurent Stocker, la composition d’abeille d’Anne Kessler, la noblesse d’Éric Ruf, la grâce d’Elsa Lepoivre, la dignité aimante de Florence Viala, la fermeté de Jérôme Pouly, l’alacrité de Danièle Lebrun, le charme gamin d’Adrien Gamba-Gontard, la finesse d’Adeline d’Hermy, la merveilleuse présence, intelligente et vive, de Georgia Scalliet, Giacinta, celle qui nous prend à témoin des aventures de la petite communauté. Les élèves comédiens sont très bons et Floriane Bonanni, violoniste, également.
Bref, une soirée belle, enjouée et mélancolique. Du très grand art.
Théâtre Ephémère de la Comédie-Française au Palais-Royal (tél. 0825.10.16.80, www.comedie-theatre.fr), jusqu’au 12 mars. À 19 heures dans la semaine et 14 heures le dimanche et certains samedis. Trois fois 1 h 15, plus deux entractes, soit 4 h 30 de présence. Texte de la traduction publié par « l’Avant-scène théâtre », 15 euros. « Cahier de la Comédie-Française,10 euros.
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