Michel Franco, cinéaste prometteur de 35 ans, filme dans « Chronic » (date de sortie non déterminée) les corps souffrants, nus souvent, de malades en phase terminale. Plus précisément, il filme longuement les gestes d’un infirmier à domicile, qui lave, habille et déshabille, nourrit, prend la main s’il le faut, et, sans grandes phrases, soutient. « Chronic » est une fiction, pas un documentaire sur l’euthanasie, et tourne autour du drame de son personnage principal, incarné avec la sobriété nécessaire par Tim Roth. Ce premier film en anglais du réalisateur mexicain est moins dérangeant qu’il y paraît, seulement troublant.
Dans « Valley of Love », de Guillaume Nicloux (17 juin), un couple défait se retrouve dans la Vallée de la mort, où les a convoqués leur fils suicidé. L’occasion pour chacun de revisiter ses manquements en tant que mère ou père, femme ou mari. Le décor suffit à apporter une ambiance irréelle, le réalisateur y ajoute un soupçon de fantastique (à moins que cela ne relève du psychosomatique). Mais il s’agit aussi et surtout d’un film sur Gérard Depardieu, dont l’énorme silhouette, peu vêtue à cause de la chaleur, envahit l’écran. En tant que comédien, l’acteur a de beaux restes, surtout quand il est soutenu par la surdouée Isabelle Huppert.
La vieillesse est un naufrage, il vaut mieux en rire. Comme dans « Youth » (sortie en septembre), de Paolo Sorrentino, où Michael Caine, 82 ans, et Harvey Keitel, 76 ans, rivalisent de dérision et d’élégance désabusée face aux assauts de l’âge, cela dans le luxe d’une clinique suisse. Le cinéaste italien n’est pas si vieux, 44 ans, pour être autant préoccupé par le temps qui passe, comme dans « la Grande Bellezza », qui lui a valu un Oscar. On comprend en revanche qu’il partage les affres de la création du personnage de Keitel, un réalisateur qui peine à finir un scénario. Et qu’il brosse si bien le portrait d’un acteur (Paul Dano) las qu’on ne lui parle que de son rôle de robot. Entre réalisme (les corps vieillissants montrés sans pudeur), baroque et humour, Sorrentino livre une nouvelle œuvre forte.
De la force, « Mountains May Depart » (9 décembre), du Chinois Jia Zhang-Ke, en manque encore moins, qui marque le passage du temps en élargissant l’écran du passé (1999) au présent (2014) puis au futur (2025), du format quasi carré jusqu’au scope. L’histoire commence avec une joyeuse jeune fille qui, dans sa ville provinciale, celle du réalisateur, hésite entre deux prétendants, l’affairiste et le mineur de fond. En suivant les trois trajectoires, Jia Zhang-Ke va montrer les tensions qui agitent son pays, avec l’obsession de l’argent et la corruption. Mais là n’est pas son principal sujet. Ce qui l’intéresse, c’est l’évolution des sentiments avec le temps et les transformations sociales et la fidélité non seulement à ceux qu’on aime mais aussi aux lieux et aux souvenirs. « Si on abandonne cela, dit-il, tout peut se défaire, même les montagnes peuvent s’en aller. » Un mélodrame qui touche au plus profond, que l’on soit Chinois ou non.
Violences en tous genres
Avec « Dheepan » (26 août), Jacques Audiard fait cœxister le mélo et le film de genre en suivant trois Tamouls de la guerre civile au Sri Lanka à la guerre de la drogue dans une cité de la région parisienne. Se défendant de toute volonté politique, il rend cependant très concrètes les dures réalités de l’immigration. Incarnées par un acteur principal débutant, Jesuthasan Antonythasan, qui fut lui-même enrôlé à 16 ans parmi les Tigres tamouls, avant de s’enfuir pour la Thailande puis la France. Un film français qui parle tamoul, cela ne manque pas d’audace. Parler de l’immigration sans apitoiement, c’est intelligent. Et « Dheepan » est aussi une histoire d’amour, qu’on a envie de voir s’épanouir.
Il faut aussi parler de « Sicario » (7 octobre), de Denis Villeneuve, qui n’a qu’un seul tort, son efficacité hollywoodienne. C’est le récit d’une opération américaine pas très orthodoxe contre un baron de la drogue mexicain. Le Candide de l’histoire est une jeune femme (Emily Blunt), agent du FBI, qui désapprouve d’un point de vue moral mais est obligée de suivre l’agent qui mène l’affaire (Josh Brolin) et l’ex-procureur colombien aux objectifs mystérieux (Benicio Del Toro). Poursuites, torture, sang, cadavres..., il y a du spectacle et du suspense et une autre effrayante réalité, celle d’une frontière américano-mexicaine devenue une zone de non-droit.
La violence de « The Assassin » (janvier 2016), de Hou Hsiao Hsien, est, elle, purement esthétique. Le film ressort du genre wuxia, ces films qui mettent en scène, dans la Chine ancienne, un chevalier errant expert en arts martiaux et en sabre, ici une jeune fille qui fait justice des gouvernants corrompus. En fait, « The Assassin » est plutôt contemplatif, épris de nature plutôt que de combat. Et comme on a du mal à suivre l’intrigue, on s’ennuie un peu. Une déception, il n’y en a pas eu beaucoup, cette année au festival.
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