METTEUR en scène révéré qui travaille aussi bien avec des comédiens russes (« Boris Godounov »), français (« Andromaque ») ou anglais (« Cymbeline »), Declan Donnellan est un artiste audacieux. Son travail est indissociable de celui du scénographe Nick Ormerod. Pour le chef-d’œuvre du théâtre élisabéthain qu’est la pièce de John Ford, qui date de 1623, l’espace est d’un rouge qui préfigure les flots de sang de la très cruelle tragédie. C’est la chambre d’Annabella (Lydia Wilson, miracle de grâce). Le lit trône au milieu de la pièce. Il est le refuge, un radeau en perdition parfois et le lieu du crime. Chambre d’ado d’aujourd’hui avec posters et bric-à-brac de casques et de lecteurs de CD. Deux portes ouvrent au fond. Côté jardin, cela donne sur les appartements du père. Côté cour, sur la salle de bains lieu des sanglants règlements de compte.
Lit du crime, oui, puisqu’il s’agit d’inceste. Giovanni (Jack Gordon, très « physique », comme il convient au jeune frère) et sa sœur Annabella s’aiment tant qu’ils finiront par devenir amants. Leur père les protège, mais ne voit rien. Leur mère est morte. Le couple est traité par Donnellan comme deux enfants face aux adultes. Même le garçon à qui on destine Annabella, enceinte, Soranzo, a l’air bien plus adulte qu’eux, avec sa barbe bien taillée et sa prestance (Jack Hawkins, excellent).
Le coup de force de Declan Donnellan, qui a pas mal coupé dans la pièce, est d’en faire par moments une comédie musicale avec ballets de groupe et musique, chansons très bien interprétées par l’ensemble de la troupe. Cela donne une couleur d’aujourd’hui à la représentation, cela oxygène l’atmosphère terrible du drame. Peut-être le metteur en scène a-t-il trop réduit les débats des deux enfants qui savent qu’ils vont basculer dans le crime.
Ici, les comédiens parlent un anglais superbe, les accents s’en mêlent malicieusement. Les sur titrages sont très lisibles et fidèles. La troupe est éblouissante. La virtuosité, le plaisir du jeu n’étouffent jamais l’émotion. Une très grande œuvre, avec des monologues d’une beauté profonde et des dialogues vifs, touchants, drôles parfois. À voir !
Les Gémeaux de Sceaux (tél. 01.46.61.36.67). du mercredi au samedi à 20 h 45, dimanche à 17 heures. Durée : 1 h 50 sans entracte. En anglais surtitré en direct par Gilles Charmant. Jusqu’au 18 décembre.
DJ et médecin, Vincent Attalin a électrisé le passage de la flamme olympique à Montpellier
Spécial Vacances d’été
À bicyclette, en avant toute
Traditions carabines et crise de l’hôpital : une jeune radiologue se raconte dans un récit illustré
Une chirurgienne aux nombreux secrets victime d’un « homejacking » dans une mini-série