Cinéma
Peut-on reprocher à une œuvre ses bonnes intentions ? Avec l’ambitieux « The Search », succédant à « The Artist », Michel Hazanavicius a voulu évoquer la guerre de Tchétchénie, qui a peu suscité d’indignation en Occident. Et il a choisi le mélo pour mieux toucher, inspiré notamment par le film de Fred Zinneman du même titre (en français « les Anges marqués »), qui se déroulait dans les ruines de Berlin peu après la guerre.
Le cinéaste filme ainsi d’un côté un petit garçon errant seul au milieu des réfugiés et sa rencontre avec une jeune femme chargée d’un rapport pour l’Union européenne et, de l’autre, un Russe de 20 ans enrôlé de force dans l’armée, laquelle va réussir à le déshumaniser. Les moyens n’ont pas manqué, non plus que l’énergie d’un réalisateur et d’une équipe engagés.
À Cannes, « the Search » a reçu un accueil plutôt tiède. Certes, la démonstration est quelquefois bavarde, quand il s’agit de parler de l’impuissance de l’Europe – un sujet très actuel – ou d’interroger les motivations humanitaires. Mais l’ensemble est fort, efficace et touchant, porté par Bérénice Bejo, Annette Bening et les interprètes tchétchènes et russes. Interrogés par l’AFP, les journalistes qui ont couvert la Tchétchénie, ont trouvé le film juste et courageux. Il serait dommage qu’il ne trouve pas un large public.
D’une violence à l’autre, sautons en Irlande avec « Calvary », deuxième long métrage écrit et réalisé par John Michael McDonagh (« l’Irlandais »). C’est un thriller qui commence dans l’ombre du confessionnal : un mystérieux paroissien, qui se dit victime d’un homme d’Église dans son enfance, annonce au confesseur qu’il va le tuer le dimanche suivant. Le suspense va monter pendant les jours qui suivent : le prêtre ira-t-il au rendez-vous fixé par son futur assassin ? En attendant, passant selon le cinéaste par les cinq étapes définies par la psychiatre Elizabeth Kübler-Ross pour le deuil (déni, colère, marchandage, dépression, acceptation), il fait la tournée du village, rencontrant les cinq ou six personnes qui peuvent plus particulièrement lui en vouloir.
Les rancœurs d’un petit village où les distractions manquent, les malheurs des uns et des autres, les hypocrisies de l’Église pourraient plomber le film. Mais ce calvaire est accompagné d’un humour noir salvateur et, même si l’on n’est pas touché par la morale du film, il est difficile d’y résister. Sans compter que l’on tient à savoir si Brendan Gleeson, acteur superbe, va s’en tirer, et que les paysages de la région de Sligo sont éloquents.
Les autres films de la semaine
Trois femmes qui se sont connues à Auschwitz se retrouvent à Berck-Plage en 1962 : s’inspirant de l’histoire de sa mère et de deux de ses amies, Jean-Jacques Zilbermann signe « À la vie ! », avec Julie Depardieu, Johanna ter Steege et Suzanne Clément. Trois femmes, aussi, dans « Tiens-toi droite », comédie farfelue de Katia Lewkowicz avec Noémie Lvovsky, Marina Foïs, Laura Smet.
Dans « Night Call », de Dan Gilroy, Jake Gyllenhaal filme la nuit les accidents ou les meutres à Los Angeles, n’hésitant pas à intervenir pour que les images soient encore plus trash, donc plus rentables. Mais l’événement de la semaine est la sortie du dessin animé « Astérix. Le Domaine des dieux », adaptation en 3D signée du toujours inspiré Alexandre Astruc, qui coréalise avec Louis Clichy.
Et aussi : « Secret d’État », de Michael Cuesta avec Jeremy Renner, sur l’alliance entre les rebelles du Nicaragua et la CIA ; « FLA » (lire faire l’amour), réalisé par Djinn Carrénard après le succès de « Donoma » ; « Mateo Falcone », d’Éric Vuillard, western corse d’après la nouvelle de Prosper Mérimée ; « l’Incomprise », d’Asia Argento, qui se souvient de son enfance (la mère est jouée par Charlotte Gainsbourg) ; « Alleluia », de Fabrice Du Welz, transposition dans les Ardennes des crimes des « tueurs de la lune de miel » (Laurent Lucas, Lola Dueñas).
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