LES AMATEURS de cinéma la connaissent depuis longtemps. Elle est capable d’incarner des personnages très divers, dans des univers très différents. Reine des Elfes ou souveraine d’Angleterre, Katherine Hepburn ou le jeune Bob Dylan, elle est une actrice caméléon.
On sait désormais qu’elle est aussi un grand clown et c’est ce que Cate Blanchett apporte de particulier à la manière dont, après l’Allemande Edith Clever ou la Française Bulle Ogier – pour celles que l’on a vues en France –, elle incarne Lotte, l’héroïne de Botho Strauss dans « Grand et Petit ».
Cette production, qui vient de Sydney, où Cate Blanchett et son mari Andrew Upton dirigent un théâtre, s’appuie sur une traduction anglaise très concise, tranchante mais sans sécheresse aucune de Martin Crimp. Le metteur en scène australien Benedict Andrews a resserré encore l’adaptation. La pièce, écrite à la fin des années 1970, raconte le long voyage d’une femme d’une quarantaine d’années, délaissée par son mari. Elle a quitté Sarrebrück pour des vacances à Agadir, au Maroc. Séjour insupportable d’ennui. Puis Lotte va traverser l’Allemagne à la recherche de ses repères. Un frère très au Nord, une amie d’enfance pas revue depuis des années, etc.
Dans un espace très simple qui laisse libre l’errance de Lotte – des murs mobiles, un semblant de façade, une cabine téléphonique –, Benedict Andrews dirige avec précision la douzaine de comédiens qui sont les personnages de « Big and Small ». Il éclaire en Lotte la part prophétique. On peut se demander si cette femme larguée n’est pas légèrement folle. Mais ici, elle est plutôt celle qui a des messages à délivrer. Et puis elle est une sorte d’Alice dans les villes qui aurait l’innocence d’une toute petite fille et obligerait les adultes à dire la vérité. Il y a aussi une souffrance profonde en elle, et une incapacité à comprendre les choses les plus simples.
Bref, un personnage très complexe dans le monde de l’orée des années 1980, avant les portables et les courriels…, mais un personnage universel tant il tient de la profonde humanité et du conte fantastique. Tout cela, Cate Blanchett le joue avec une maestria époustouflante. Mais surtout, et c’est ce qui fascine, elle laisse sourdre une joie extraordinaire à jouer, une jubilation communicative dans la manière dont elle vit sur le plateau. De plus, elle donne quelque chose de délibérément clownesque à sa Lotte. Elle n’étouffe pas le tragique, ni la fragilité, mais elle joue et se joue de tout comme un immense clown. C’est un travail très original, très rare. Formidable.
Théâtre de la Ville (tél. 01.42.74.22.77, www.theatredelaville-paris.com), à 20 h 30 jusqu’à samedi et dimanche 8 avril en matinée à 15 heures. Durée : 2 h 30, entracte compris. En anglais avec surtitres.
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