Et si la future réforme des retraites s'inspirait directement des caisses des professions libérales de santé ? C'est en tout cas le vœu de trois caisses de retraite représentant les médecins (Carmf), les pharmaciens (Cavp) et les chirurgiens-dentistes et sages-femmes (CARCDSF) dont les élus s'associent aujourd'hui pour « partager l'expérience réussie de leur modèle de gestion autonome depuis près de 70 ans » et formuler des propositions.
Le message de ces trois caisses (qui espèrent s'adjoindre d'autres professions libérales) est clair : à l'heure où la réforme des retraites s'invite dans la campagne présidentielle — le candidat Emmanuel Macron ayant annoncé sa volonté de repousser l'âge de départ légal à 65 ans — mieux vaudrait tenir compte de ce qui a déjà fait ses preuves. « On représente des systèmes de retraite qui fonctionnent, qui ont prouvé leur capacité de résilience dans la crise et leur robustesse », plaide Philippe Berthelot, président de la Caisse d'assurance-vieillesse des pharmaciens (Cavp).
Contraintes spécifiques
Trois orientations structurent les propositions des caisses des libéraux de santé. La première concerne la garantie pour tous les Français d'une retraite de base « équitable et solidaire ». Pour ce premier étage (géré par les diverses sections professionnelles pour le compte de la CNAVPL), il s'agit d'assurer qu'à revenu égal, un euro cotisé procure les mêmes droits, les revenus modestes bénéficiant de droits majorés. Les libéraux font valoir qu'ils ont un commun le même régime de base, géré en points, particulièrement solidaire (plus les revenus sont élevés et plus le rendement de la cotisation baisse). « Cela profite aux faibles revenus », souligne Éric Quievre, président de la CARCDSF.
Deuxième orientation : la nécessité de compléter cette retraite de base par des régimes complémentaires vraiment autonomes « adaptés aux situations et modes d'exercice ». En clair, plutôt qu'un vaste pot commun (le régime universel), les caisses des libéraux de santé veulent garder la main sur le pilotage des régimes complémentaires, selon les contraintes de chaque profession. Les libéraux expliquent que leurs élus ont été capables d'instaurer la répartition provisionnée permettant de mobiliser de coquettes réserves (constituées en période favorable) lorsque les cotisations ne permettent plus de payer les pensions, mais aussi d'apporter des aides directes à leurs affiliés. « Et contrairement aux régimes spéciaux, nos caisses autonomes n'ont jamais sollicité d'argent public pour équilibrer leurs comptes », s'enorgueillit le Dr Thierry Lardenois, président de la Carmf, qui gère à la fois le régime complémentaire vieillesse des médecins libéraux et celui des prestations complémentaires de vieillesse (dit ASV) pour les praticiens conventionnés. C'est aussi cette autonomie qui a permis aux pharmaciens de créer un régime de capitalisation collective dès les années soixante…
Chez les médecins, le « temps choisi » à imiter ?
Enfin, à rebours des candidats qui proposent de reporter l'âge légal de départ à la retraite de plusieurs années, les trois présidents de caisse défendent au contraire la liberté de partir « à partir de 62 ans » quelle que soit la durée de cotisation, mais en bonifiant les pensions grâce à des coefficients de majoration au-delà de ce seuil. De fait, alors que l'âge moyen de départ en retraite des médecins libéraux se situe à 65,7 ans, la CARMF a instauré il y a cinq ans un système de retraite « en temps choisi », permettant de récompenser ceux qui travaillent au-delà de 62 ans (majoration de 5 % par an jusqu'à 65 ans — l'âge sans décote — puis de 3 % jusqu'à 70 ans). Là encore, le Dr Lardenois invite le futur président réformateur des retraites à regarder ce qui se fait du côté des libéraux de santé. Des professions libérales qui ont constitué au fil du temps pas moins de 25 milliards d'euros de réserves.
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