En pleine crise sanitaire, les temps sont durs pour les cabinets de médecins libéraux, pour les généralistes mais surtout pour les spécialistes, qui ont vu leur activité baisser drastiquement. Depuis plusieurs semaines, nombre de syndicats alertent les pouvoirs publics sur ce point.
Les ophtalmologues libéraux ont tous subi le contrecoup du confinement, révèle leur syndicat, le SNOF, dans une enquête. Les trois quarts d'entre eux ont vu la quasi-totalité de leurs rendez-vous annulés. Si 60 % des cabinets restent ouverts, leur activité est en baisse nette depuis le passage de l'épidémie en stade 3. Plus de huit ophtalmos sur dix disent même enregistrer une baisse d’au moins 95 % par rapport à d'habitude. Une conséquence des consignes de confinement pour 92 % des spécialistes interrogés, même si certains évoquent également la peur des patients d’attraper le virus en venant en consultation (61,3 %) ou les contrôles par les forces de l’ordre (13,5 %).
Conséquence : les trois quarts des ophtalmologistes ouvrent moins de 10 heures par semaine et ils ont dû prendre des mesures pour limiter l'impact économique sur leur cabinet. Le chômage partiel pour le personnel a été privilégié dans neuf cas sur dix, mais aussi les arrêts maladie pour la garde des enfants (37 % des cabinets) et la prise de congés payés anticipés (18 %).
Versement d'un douzième du chiffre d’affaires annuel
Pour que la situation ne s'aggrave pas, le gouvernement a indiqué en début de semaine son intention de légiférer par ordonnance pour compenser la perte de revenus des professionnels de santé libéraux. Les détails de cette aide seront discutés pour chaque profession de santé conventionnée (médecins, dentistes, infirmiers, etc.) et des réunions serviront à « mettre en place des grilles d'évaluation » tenant compte du niveau de revenus, de la chute d'activité, des charges fixes et des autres aides perçues.
Mais les représentants des médecins spécialistes libéraux veulent aller plus loin. « L’activité des spécialistes a chuté de 80 %. Il y a urgence à accompagner les médecins sur le terrain, au risque de les voir disparaître », plaide ainsi Avenir Spé, qui représente une quinzaine de spécialités médicales. La structure du Dr Patrick Gasser demande « en urgence » le versement mensuel d’un douzième du chiffre d’affaires annuel des médecins concernés (calculé en prenant en compte le taux de charge et du coût de la pratique), mais aussi l’exonération de charges, durant toute la période de confinement de l’ensemble des médecins spécialistes et généralistes, quel que soit leur secteur. Sur le moyen terme, Avenir Spé demande aussi que l’impact de la crise actuelle soit pris en compte sur les dépenses de santé.
De son côté, le SML, craignant « qu'une fois de plus l'État ne soit en train de construire une usine à gaz », demande peu ou prou la même chose. Il propose une aide correspondant à un douzième de la part des honoraires habituellement encaissés par chaque médecin, pour qu'ils puissent régler leurs charges, et l’annulation de toutes les cotisations sociales pour la période concernée.
Les Spécialistes-CSMF sont tout aussi inquiets. Ils appellent à « sauver les entreprises médicales ». « Il est indispensable que l’État prenne en charge les déficits de nos cabinets dus aux charges structurelles et au chômage partiel de nos collaborateurs », estime la branche spécialisée de la Conf, qui a envoyé une liste de demandes au ministre de la Santé Olivier Véran et à l'assurance-maladie (CNAM).
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