Conçus il y a 18 mois avec la loi de santé, les groupements hospitaliers de territoire (GHT) franchissent ce samedi une nouvelle étape, du moins sur le papier.
Dessinés par les agences régionales de santé (ARS), les 135 regroupements d'hôpitaux avaient jusqu'au 1er juillet pour concevoir leur projet médical partagé (PMP), pierre angulaire d'une réforme territoriale qui vise à traduire l'objectif d'une médecine interétablissements et d'une prise en charge graduée par filière de soins.
Si la majorité des PMP seront rendus dans les temps (avec calendrier de déploiement jusqu'en 2021), seront-ils pour autant cohérents et pérennes ? Depuis des mois, le secteur s'alarme d'une carte sanitaire brouillonne, de projets parfois mal ficelés (avec des hôpitaux de même taille ou même spécialité), inachevés (filières en jachère) ou impossibles à concrétiser, faute de concertation suffisante.
Réforme bureaucratique, accompagnement insuffisant : les critiques n'ont pas manqué, y compris chez les cadres hospitaliers. Une très récente enquête du Syndicat des managers publics de santé (SMPS) confirme qu'un directeur sur deux seulement estime que les conditions de mise en œuvre sont « adaptées aux enjeux de recomposition sanitaire ». « Les délais impartis étaient très courts, reconnaît Jean-Pierre Dewitte, président de la conférence des directeurs de CHU. C'est bien joli d'instituer des consultations avancées sur le papier, encore faut-il avoir des médecins pour les concrétiser. »
Opportunité ou couperet ?
Après l'enthousiasme, le scepticisme a gagné du terrain chez les praticiens hospitaliers. Pour le Pr Sadek Beloucif (SNAM-HP), la méthode choisie – définir le territoire avant le projet médical – plombe une réforme espérée comme un « outil de cohésion sociale ». Le Dr Norbert Skurnik (CMH) juge lui aussi que les GHT souffrent d'un « défaut de fabrication » originel en raison de leur périmètre « dans l'ensemble imposé » par les ARS. Jacques Trévidic (APH) confirme les craintes : « Les petits hôpitaux ont eu du mal à se faire entendre. Certaines ARS ont imposé leur loi sur les équipes médicales partagées, en menaçant de fermer les petits plateaux techniques. » Moins sévère, le Dr Rachel Bocher (INPH) s'inquiète toutefois de la « complexité » d'une réforme « peu attractive pour les médecins qui n'ont guère le temps de jongler avec une prime [d'exercice territorial, NLDR] à quatre niveaux » (selon leur temps de mobilité).
De la souplesse, du sur-mesure
Consciente du malaise, la nouvelle directrice générale de l'offre de soins (DGOS, ministère de la Santé) Cécile Courrèges a donné des gages de « souplesse » dans la mise en œuvre de cette réforme. Les ARS ont reçu des consignes en ce sens, y compris sur le calendrier. Les GHT en difficulté pourraient rendre leur copie en septembre. Et les projets médicaux partagés seront évolutifs : ceux du 1er juillet ne sont pas forcément gravés dans le marbre. Pas question non plus de plaquer un modèle unique.
Prochaine étape le 1er janvier, avec l'élaboration d'un système d'information par GHT et l'articulation de la réforme avec la seconde génération des projets régionaux de santé, qui fixent aussi le cadre territorial pour le secteur médicosocial. « Ce sera notre prochain point de vigilance de la réforme », anticipe le Dr Thierry Godeau, patron de la conférence des présidents de CME de CH.
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