C’est dans une ambiance bon enfant qu'une centaine de cadres du Syndicat des médecins libéraux (SML) se sont retrouvés ce samedi, à Nice pour deux jours de brainstorming, dans le cadre des Journées de rentrée du syndicat. Après les scores très décevants de la centrale aux récentes élections professionnelles [9,5 % chez les généralistes, 12 % chez les spécialistes, Ndlr] et une année de crise particulièrement éprouvante, les adhérents entendaient ouvrir une nouvelle séquence et préparer ensemble les futures échéances conventionnelles et politiques.
Hommages aux médecins décédés
Un court métrage émouvant, diffusé en ouverture des Journée, a permis de rendre hommage aux 74 médecins libéraux décédés du Covid. Ce film voulait aussi témoigner de l’engagement sans faille des praticiens libéraux pour avoir pris en charge les patients, même « sans masques, sans tests et sans vaccins », au début de la crise sanitaire.
S’appuyant sur les témoignages de confrères « abandonnés » dans la tempête, le Dr Philippe Vermesch, président du SML s’est montré d'emblée très offensif. Se présentant comme le chef de file d'un syndicat 100 % libéral, il a fustigé « la bureaucratie qui entrave l’exercice et désespère les jeunes » et taclé les syndicats qui, contrairement au SML, ont signé cet été l’avenant 9 pour « ramasser ce qu’il y a sur la table alors que ce qui est proposé n’est pas à la hauteur des attentes des médecins ni des enjeux actuels. »
Un avenant qui manque sa cible
Lors de la matinée plus politique, la défense de la valeur des actes médicaux est restée le fil rouge des échanges, en présence de Thomas Fatôme, directeur général de l'Assurance-maladie. La veille déjà, dans un entretien au « Quotidien », le Dr Philippe Vermesch, avait souligné que la consultation de base devrait être au minimum de 40 euros.
Le stomatologue du Var a donc exhorté l’État et la CNAM à investir davantage sur l’acte médical, au lieu de généraliser les forfaits, vécus ici comme « le début de la fonctionnarisation de la médecine libérale ». L’avenant 9, juge le SML, ne comporte « aucune avancée sur la valeur de la consultation de base » (mais des majorations ciblées pour telle ou telle spécialité) et il « bride la visite longue » (70 euros pour les plus de 80 ans en ALD dans la limite de quatre visites par an et par patient).
Malentendus
D'autres signaux sont jugés inquiétants pour la profession.
Devant ses cadres, le patron du SML s'est dit « heurté » par la décision d’Emmanuel Macron de rembourser (sur prescription médicale) les consultations de psychologues pour tous les Français à partir de trois ans à 40 euros la première séance (puis 30 euros chacune les suivantes). « Elle vaut plus que la consultation du médecin généraliste et plus que celle du psychiatre ! C’est choquant, et pour tout dire inacceptable », a-t-il tonné. « Y a-t-il un problème idéologique et culturel dans ce pays à revaloriser l’acte médical? », a encore lancé le Dr Vermesch, sous les applaudissements nourris de ses troupes.
Le patron de la CNAM Thomas Fatôme, invité de marque du congrès, s'est employé à rassurer les libéraux sur la question sensible des modes de rémunération. « L'Assurance-maladie n'a pas le fantasme de salarier les médecins. On a besoin de médecins libéraux et on va continuer à les aider et à les accompagner pour se regrouper et se coordonner avec les paramédicaux », a-t-il prétendu. Et de déplorer au passage un « malentendu » sur l’avenant 9. « Il n’a pas été question de revaloriser la consultation ! Mais on n’a jamais signé un avenant aussi important, avec 800 millions d’euros à la clé. S’il n’y avait pas eu la crise, le Ségur, on aurait signé pour 150 millions d’euros », a-t-il recadré.
Rémunération horaire
Par ailleurs, a martelé le DG, ce texte comporte bien des avancées tarifaires comme l’avis ponctuel de consultant (APC) pour les spécialistes, l’élargissement de la visite longue (VL) et les revalorisations des consultations des psychiatres et des pédiatres. « C’est de l’acte ! Je pense que les médecins libéraux doivent sortir d’une sorte de parano affirmant que les pouvoirs publics ne souhaitent pas valoriser l’acte. Mais il est utile d’orienter l’activité en faisant des choix. Faisons le bilan de la rémunération et vous verrez que l’acte progresse », a-t-il assuré.
Et concernant la différence de tarifs avec les séances de psychologues, Thomas Fatôme a assumé. « Les tarifs sont ce qu’ils sont. La consultation psychiatrique a été revalorisée à 42,50 euros. Il faut regarder la rémunération horaire et cela ne me paraît pas absurde. »
Frilosité sur les délégations de tâches
Devant une salle pas vraiment acquise à sa cause, le DG a lancé une autre pique. « Je suis interrogatif sur la frilosité des médecins sur la délégation de tâches. Est-ce que c’est aux médecins de faire des rappels de vaccins de base pour un adulte ou un enfant ? Il faut avancer sur ce sujet », a-t-il avancé. Face à ce reproche à peine voilé, le Dr Vermesch a rétorqué. « On ne nous laisse que des cas complexes. À 25 euros, cela ne passera pas ! »
Malgré ces désaccords, la CNAM promet d'être attentive aux travaux et propositions du SML dans le cadre des négociations de la future convention médicale, qui s’ouvriront à la rentrée 2022. Tous les sujets seront sur la table : tarifs, assistants médicaux, rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP), secteur II, contrats de pratique tarifaire maîtrisée (OPTAM), prévention ou encore démographie médicale, un sujet sur lequel le SML « fourmille d'idées » pour rendre plus attractive la médecine libérale auprès des jeunes et des seniors.
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique