À l'approche des élections municipales, experts et élus remontent au créneau sur la question de l'accès aux soins. Mercredi, le sénateur centriste de l'Eure Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire de la Haute Assemblée, a fait valoir dans un rapport que « 6 à 8 millions de Français » vivaient dans un désert médical.
Ce jeudi, nouvelle alerte au colloque de MG France : Joy Raynaud, docteur en géographie et aménagement du territoire, spécialiste de l'accès aux soins, a jugé que « les difficultés existent partout sur les territoires ». Des difficultés multidimensionnelles comme la faiblesse de la densité médicale, l'accessibilité, le temps d'attente pour un rendez-vous mais aussi le quartier dans lequel se situe le cabinet.
30 % de généralistes âgés de plus de 60 ans
Concernant la démographie, la France compte 102 000 généralistes (tous modes d'exercice) sur 226 000 médecins en 2018. Quelque 11 000 omnipraticiens ont été perdus en dix ans. « Et d'ici à 2025, on prévoit seulement 77 000 généralistes (tous modes d'exercice) » en raison des départs massifs en retraite non remplacés. Mais surtout, le choix privilégié du salariat (63 % des nouveaux inscrits) ainsi que l'appétence pour l'exercice mixte ou le remplacement changent la donne avec de moins en moins de généralistes libéraux actifs à temps plein. Autre constat, il y a « de plus en plus de médecins généralistes âgés de plus de 60 ans : 5 % en 2004 mais 30 % en 2018 », commente Joy Raynaud.
La comparaison est assez frappante avec deux autres professions (infirmiers et kinés libéraux). Elle montre que le nombre global de généralistes libéraux est resté (au mieux) stable depuis 2004 alors que le nombre des paramédicaux libéraux augmente. Même constat pour l'évolution de la densité : celle des généralistes de ville s'effrite depuis 2005 alors celle des infirmiers et des kinés progresse nettement.
Selon la géographe, le taux d'évolution annuel de la densité des généralistes libéraux est « négatif sur les trois quarts des bassins de vie » depuis 2006 (-1,4 % en moyenne). « On ne peut pas dire que la baisse touche davantage le centre de la France, le milieu rural. Non, le problème concerne l'ensemble des territoires, la vigilance est de mise partout », recadre Joy Raynaud.
Cette fragilité de la densité des généralistes libéraux contraste avec celle des infirmiers qui affichent un taux d'évolution annuel positif sur 94 % des bassins de vie.
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