Est-il possible d’hériter d’un patient ? On vous l'accorde, la question se pose rarement. Vous ne vous l'êtes probablement même jamais posé. Mais une décision rendue le 16 septembre par la Cour de cassation vous apporte la réponse.
Celle-ci, relative à un conflit opposant le frère d’une femme décédée en 2014 à son infirmière libérale explique que les membres des professions médicales ou paramédicales qui ont soigné un patient pour la maladie dont il est mort n'ont pas le droit d'hériter ou de recevoir un legs. Et ce, quelles que soient la chronologie des faits et les circonstances.
L’infirmière, qui figurait sur le testament de la défunte réclamait les « divers biens » qui lui étaient légués dans le document. Le fils s'y opposait en rappelant que le Code civil interdit expressément aux médecins, pharmaciens ou auxiliaires médicaux de recevoir un legs du patient qu'ils ont soigné pour la maladie dont il est mort.
Un legs lié aux liens affectifs anciens avec la défunte, selon l’infirmière
Pour justifier sa demande, l'infirmière avait fait valoir qu'elle était une vieille amie de la patiente et qu'il n'y avait rien de suspect puisque le testament était antérieur au diagnostic du cancer. Personne, disait-elle, n'avait connaissance de la maladie à la date du testament et cela prouve que le cadeau fait par la patiente à l'infirmière n'était pas lié à ses soins mais à leurs liens affectifs anciens. À l’époque, en déduisait l'infirmière, la patiente n'était donc pas soignée pour la maladie dont elle est par la suite décédée.
La cour d'appel lui avait donné raison en soulignant que l'interdiction devait être interprétée strictement, mais elle a eu tort, d'après la Cour de cassation. Quelle que soit la date du diagnostic et celle du testament, antérieur ou non, la maladie existait au jour du testament et cela suffit à interdire à l'infirmière de recevoir un legs.
En janvier 2014 cependant, pour une autre affaire, la Cour de cassation avait admis qu'un médecin hérite d'un patient bien qu'il ait dispensé des soins. Elle jugeait que dans la mesure où ce médecin intervenait ponctuellement, selon les instructions d'un autre qui dirigeait les soins, ou s'il intervenait en raison de liens affectifs anciens, il n'avait alors pas prodigué les soins réguliers et durables qui interdisent d'hériter.
(Avec AFP)
Missions, consultation et diagnostic, prescription : le projet Valletoux sur la profession infirmière inquiète (déjà) les médecins
Désert médical : une commune de l’Orne passe une annonce sur Leboncoin pour trouver un généraliste
Pratique libérale : la chirurgie en cabinet, sillon à creuser
Le déconventionnement tombe à l’eau ? Les médecins corses se tournent vers les députés pour se faire entendre