Rémunération

Évolution de l'expérimentation Peps, les centres de santé demandent une nouvelle donne

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Publié le 30/11/2022
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L’expérimentation de paiement en équipe de professionnels de santé en ville (Peps) doit se poursuivre jusque mi-2024, mais un nouvel arrêté vient changer en partie le cahier des charges avec un plafonnement de la rémunération. Une évolution qui mécontente les centres de santé qui font une autre proposition à l'Assurance maladie.

Crédit photo : GARO/PHANIE

Depuis janvier 2021, une quinzaine de structures d’exercice coordonné, essentiellement des centres de santé, expérimentent le dispositif lancé dans le cadre de l’article 51 : Peps (paiement en équipe de professionnels de santé en ville).

Pour les équipes qui l’expérimentent, une rémunération forfaitaire collective des professionnels de santé est mise en place en remplacement du paiement à l’acte. Versé de manière trimestrielle, le forfait est calculé en fonction du nombre de patients « médecin traitant » inscrits dans la structure et est pondéré par la qualité des soins fournis et les caractéristiques de la patientèle. Les structures pouvaient choisir à ce que le forfait concerne uniquement la patientèle « médecin traitant » diabétique, la patientèle « médecin traitant » âgée de plus de 65 ans ou l’ensemble de la patientèle « médecin traitant ». La plupart des équipes l’expérimentent sur cette dernière option.

Un plafonnement à 20 %

L’expérimentation est toujours en cours jusqu’à mi-2024 mais au Journal officiel du 26 novembre, un arrêté daté du 10 novembre vient modifier légèrement son cahier des charges. La modification principale repose sur l’introduction d’un plafonnement de la rémunération perçue par chaque équipe par rapport à la rémunération perçue selon les modalités tarifaires antérieures. Ainsi l’arrêté stipule : « étant donnée la sécurisation financière pour les acteurs, le montant maximal versé au total ne peut être supérieur à 20 % de l'ensemble des revenus que les professionnels auraient perçus au titre du paiement à l'acte en année N-1 sur le périmètre concerné ».

Une évolution à laquelle s’attendaient les centres de santé. « L’Assurance maladie a mis ce plafonnement parce qu’elle a perdu la vision qui lui permettait de comprendre ce qu’elle paie », explique le Dr Alain Beaupin, président de l’Institut Jean-François Rey (IJFR). En effet, avec la « disparition de l’acte » dans les structures qui expérimentent Peps, l’Assurance maladie n’a plus ce retour sur l’activité des centres de santé obtenus grâce à la facturation des actes de médecine générale et de soins infirmiers. L’Assurance maladie avait donc invité les équipes à déposer sur une plateforme des données d’activité. Une demande qui avait été loin de faire l’unanimité chez les équipes.

La prudence de l’Assurance maladie à « ouvrir les vannes » s’explique aussi peut-être par le risque de voir se développer des comportements opportunistes, avance le Dr Beaupin. « On voit naître des centres de santé opportunistes qui se disent qu’il y a de l’argent à se faire. Tant que ce n’est pas sécurisé, je comprends que l’Assurance maladie plafonne ce paiement au forfait. Il y a un risque pour eux de se retrouver à financer des gens qui joueraient un autre jeu. Mais pourquoi sanctionner ceux qui font bien ? », interroge-t-il.

Un engagement à fournir des données 

Cette évolution mécontente donc les centres de santé mais ils y voient aussi un argument pour défendre la proposition qu’ils ont fait récemment au directeur général de l’Assurance maladie, Thomas Fatôme, dans une lettre.

Signée de l’IJFR, l’Union syndicale des médecins des centres de santé (USMCS) et de la Fédération nationale des centres de santé (FNCS), la lettre propose de tirer parti de la création de l’entrepôt de données de santé (EDS) dédié aux centres de santé, qui sera géré par l’IJFR, pour donner l’opportunité à l’Assurance maladie de mieux connaître les prestations de soins préventifs et curatifs qu’elle rémunère de manière forfaitaire. « Une demande légitime » de la part du payeur, selon les représentants des centres de santé.

« L’expérimentation a fait preuve de sa pertinence sur le terrain pour les centres de santé, souligne le Dr Beaupin. Nous ne voyons pas l’intérêt de prolonger l’expérimentation au-delà de 2024 ». La proposition est donc de transposer l’expérimentation dans le droit commun à travers une option conventionnelle à l’intérieur de l’accord national des centres de santé.

« Cette option conventionnelle serait ouverte aux centres de santé volontaires sous condition qu’ils acceptent de partager leurs données cliniques au sein de l’EDS des centres de santé », détaille le Dr Beaupin.

Les négociations du nouvel accord national des centres de santé doivent débuter en 2023.


Source : lequotidiendumedecin.fr