C'est bien connu, les jeunes s'installent de moins en moins. Ou alors, après dix ans de remplacement. Et alors, le plus souvent, ils vissent leur plaque en maison de santé pluridisciplinaire (MSP) ou dans un cabinet de groupe. Mais combien sont-ils encore à s’installer seuls ? Difficile à savoir, car les statistiques de l’Ordre se bornent à recenser le mode d’exercice (libéral, salarié, mixte), oubliant l’organisation du cabinet. Une chose est sûre : les jeunes médecins qui sautent le pas en solo sont très rares. Et pourtant, ce type d’installation peut convenir à certains. À condition de savoir s'y prendre.
En effet, le praticien qui s'installe seul n'a personne avec qui partager la paperasserie du cabinet. C'est une lapalissade, mais elle a des conséquences lourdes sur la gestion quotidienne. On déconseillera donc l'aventure aux phobiques administratifs. Celui qui, au contraire, a la fibre entrepreneuriale trouvera peut-être quelque plaisir, tel un navigateur solitaire, à piloter ces tâches. Autre point important : exercer sans associé, c’est se passer des corollaires de l’exercice en groupe que sont le travail en équipe, le regard des confrères sur sa propre pratique, les discussions professionnelles autour d'un café... Autant d’éléments qui font pour la plupart des médecins de la nouvelle génération le sel de la pratique, mais qui sont pour d'autres un véritable pensum. C'est donc à ceux qui préfèrent être seuls plutôt que de prendre le risque d’être mal accompagnés que le cabinet individuel pourrait convenir.
Se lancer en connaissance de cause
Si on ne devait donner qu'un conseil aux candidats à l’installation en solo, ce serait de ne pas s'attendre à gagner mieux leur vie que leurs confrères installés à plusieurs. Tout seul, on ne partage pas les charges, et cela a un impact mécanique sur les revenus du cabinet. Dans certaines zones où les loyers sont particulièrement élevés, cela peut même rendre l'exercice difficile, voire impossible. Et partout, il faudra de toute façon faire des concessions : il est par exemple très difficile d’avoir un secrétariat physique présent au cabinet si on n’a personne pour aider à payer son salaire.
Autre conseil : le médecin solitaire doit, plus encore que les autres, savoir s’y prendre pour assurer la continuité des soins. Sans aide extérieure, il est délicat d'assurer une plage d'ouverture de 8 heures à 20 heures tous les jours. Sans parler des vacances, indispensables si l'on ne veut pas s'épuiser à la tâche. L'entente avec les confrères installés sur le même territoire est donc primordiale, sous peine de laisser ses patients sans solution. Et peut-être plus encore qu’un médecin installé avec plusieurs autres, le généraliste solitaire doit pouvoir compter sur un pool bien organisé de remplaçants.
Et les aides ?
Une fois ceci posé, l’exercice solitaire peut devenir viable, voire épanouissant. Malgré sa volonté de promouvoir l’exercice de groupe, le législateur n’a en effet pas supprimé toutes les aides à l’installation pour ceux qui s’installent en solo. Le contrat de Praticien territorial de médecine générale (PTMG), qui garantit un revenu minimal pendant deux ans à ceux qui démarrent leur activité dans une zone sous-dotée, leur est par exemple ouvert. Et les collectivités territoriales des zones en tension, qui prennent souvent en charge certaines dépenses pour attirer les généralistes, ne conditionnent généralement pas leur offre à l’exercice en groupe.
Il est vrai que l’aide forfaitaire à l’installation de 50 000 euros, payable en deux fois par les Agences régionales de santé (ARS) et Caisses primaires d’assurance maladie (CPAM), est de son côté conditionnée à la création d’une Équipe de soins pluriprofessionnelle (ESP). Mais rien n’interdit d’être le seul médecin de cette équipe, et d’y exercer depuis un cabinet individuel. Il faut se rendre à l’évidence : si la solitude est encore possible dans l’exercice libéral, elle ne peut se concevoir que si le médecin est bien connecté à ses confrères et aux autres professionnels de santé !
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