Invité du Café nile, think tank en santé, le Pr Jean Sibilia, président de la conférence des doyens des facultés de médecine, est revenu sur la réforme du premier cycle des études en santé.
Promesse d'Emmanuel Macron, la suppression de la première année commune aux études de santé (PACES) et du numerus clausus est l'une des mesures clés de la loi de santé votée en première lecture à l'Assemblée nationale. L'objectif du gouvernement est de diversifier les profils des professionnels de santé et de mettre un terme à un système de sélection jugé inhumain – plusieurs milliers d'étudiants échouant chaque année sans réorientation.
Ne pas mentir aux jeunes
Mais pour le patron des doyens, il ne faut pas s'y tromper. Si le numerus clausus disparaît en tant que « verrou » national, l'entrée dans le cursus de médecine restera très sélective. « Il y a une suppression du concours de PACES et une "révision" du numerus clausus, je suis prudent, car la notion de suppression du numerus clausus est un abus » de langage, corrige le Pr Sibilia. Et d'ajouter : « Il faut dire les choses, ne pas mentir aux jeunes et à leurs familles. On supprime la sémantique numerus clausus mais on va garder le principe de sélectivité et de mesure des besoins sur les terrains. »
Plusieurs arrêtés et décrets sont en préparation pour cadrer la nouvelle méthodologie visant à définir le nombre d'étudiants autorisés à poursuivre leurs études dans les cursus santé. Plutôt qu'un quota rigide fixé d'en haut, l'idée est de proposer une fourchette modulable, tenant compte des capacités de formation de chaque faculté mais aussi des besoins en professionnels de santé dans les territoires à l'horizon de dix à quinze ans, définis par les agences régionales de santé (ARS).
« C'est toute la difficulté, admet le Pr Sibilia. Il faut imaginer une méthodologie de travail parce que définir une capacité de formation, c'est faisable, on sait combien de terrains de stages il peut y avoir, combien d'enseignants sont nécessaires, la charge pédagogique, etc. En revanche, modéliser les besoins en soins dans les territoires de façon fine, c'est très compliqué ! Dans dix à quinze ans, quels seront les métiers de santé ? Que fera le généraliste de proximité ? Le radiologue avec l'IA ? Comment la collaboration s'articulera entre les professionnels de santé ? »
Quel coût ?
L'autre mission délicate consiste à définir les modes d'entrée dans les études, via un « portail santé » (une première année universitaire générale en santé) ou via une première année de licence classique (« portail de licence ») avec une mineure santé.
Là encore, de multiples questions se posent. « Il faudra trouver le juste équilibre entre les différentes voies, prévient le patron des doyens. Toutes les formations peuvent-elles ouvrir les portes aux études de santé ? Les licences avec mineure santé seront-elles vraiment attractives ? Apporteront-elles une diversification des profils ? »
Enfin, la réforme aura un coût, qui reste à préciser : création d'enseignements en santé pour les licences classiques, évolutions pédagogiques, simulation ou encore augmentation du nombre de soignants à l'Université (avec les formations maïeutiques et de sciences infirmières…). La réforme du premier cycle s'écrit encore en pointillé.
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