Pour ou contre les médecines complémentaires dans le cursus des études médicales ? Lors d'un colloque organisé mi-avril à Paris, l'Intersyndicale nationale des internes (ISNI) s'est interrogée sur la place à accorder à ces pratiques souvent méconnues des jeunes médecins.
La place des médecines complémentaires dans les facs divise en profondeur. En septembre dernier, le doyen de faculté de Lille 2 a suspendu son DU d'homéopathie dans l'attente de l'avis de la Haute autorité de santé (HAS) sur l'efficacité des traitements homéopathiques et leur remboursement. Celui d'Angers l'a carrément supprimé. Plus récemment, c'est l'Académie de médecine qui a mis un carton rouge à l'enseignement de l'homéopathie dans les facultés. Le Collège national des généralistes enseignants (CNGE) appelle carrément à bouter « ces méthodes ésotériques qui appartiennent à l'histoire » hors des amphis. Dans l'autre camp, plusieurs universités résistent à l'instar de Brest et Strasbourg, qui proposent un cours d'information sur les médecines complémentaires aux étudiants du second cycle.
Médecin homéopathe à Reims et coordinateur du diplôme interuniversitaire (DIU) de Reims-Brest-Lyon Sud de thérapeutique homéopathique, le Dr Antoine Demonceaux regrette cette vague de désengagement au regard de l'engouement du grand public pour cette pratique : « 74 % des Français sont favorables, 56 % l'utilisent, trois générations de patients se soignent avec, il y a une confiance. »
Pour le Pr Christian Hervé, président de la Société française et francophone d’éthique médicale et de l’Académie internationale d'éthique, médecine et politique publique, cette méconnaissance des médecines complémentaires pendant les études est un manque à gagner pour les jeunes : « Ne pas intégrer tous les points de vue est à mon sens une erreur. La vision reste purement technique pendant les études. Il faut avoir une ouverture d'esprit, plutôt que d'apprendre des conduites à tenir ».
Démystifier
Outre l'homéopathie, force est de constater que d'autres pratiques alternatives séduisent. 40 % des Français aurait testé l'acupuncture, selon le Dr Annie Felten, généraliste membre de l’association française d’acupuncture. Même si une poignée de facultés initie les jeunes, cette pratique émanant de la médecine chinoise s'est progressivement fait une place dans les hôpitaux. L'AP-HP l'a adoptée dans des situations difficiles d'oncologie et de soins palliatifs comme soins de support. « À l'AP-HP, des études sur la douleur chronique en gériatrie, sur les troubles musculo-squelettiques du personnel hospitalier et la douleur lombo-pelvienne de la grossesse ont été menées depuis 2008 [...]. Les résultats sont satisfaisants », reprend le Dr Felten. L'hypnose médicale creuse aussi son trou. Stéphane Radoykov, interne en psychiatrie utilise cette technique toutes les semaines auprès des patients pour la gestion émotionnelle. Également fondateur de l’association Hypnocrate, il assure des ateliers de découverte pour les étudiants en santé : « Ils viennent par curiosité, certains sont sceptiques, commente-t-il. C'est un outil de communication entre le médecin et le patient et une technique relativement sûre. »
Face aux initiatives trop disparates, l'une des solutions serait de nationaliser un cours sur les médecines complémentaires. Pour le Pr Jean-Yves Fagon, réanimateur et co-rédacteur d'un rapport sur les thérapies complémentaires à l’AP-HP, il faut développer l'information mais de façon coordonnée : « Quelle est la plus value pour le patient ? Quand introduire ces informations dans le cursus ? Toutes les médecines complémentaires ou juste une discipline ? Ce sont les questions que chaque porteur de projet éducatif doit se poser », détaille-t-il.
Si cette journée était l'occasion de démystifier les médecines complémentaires et d'amener le débat, l'ISNI est restée en retrait du débat. Le syndicat a l'intention de travailler en profondeur sur le sujet afin de prendre une position officielle avant l'été.
« L’accès au secteur 2 pour tous, meilleur moyen de préserver la convention », juge la nouvelle présidente de Jeunes Médecins
Jeu concours
Internes et jeunes généralistes, gagnez votre place pour le congrès CMGF 2025 et un abonnement au Quotidien !
« Non à une réforme bâclée » : grève des internes le 29 janvier contre la 4e année de médecine générale
Suspension de l’interne de Tours condamné pour agressions sexuelles : décision fin novembre