Étudier pendant un semestre en Suède, en Italie ou en Espagne ? Une option offerte à tous les étudiants par le programme Erasmus depuis 30 ans, mais qui ne séduit pas les carabins. Les étudiants en médecine sont ainsi dix fois moins nombreux à réaliser une mobilité européenne que leurs camarades d’autres filières.
Entre 2014 et 2020, seuls 6 200 étudiants en santé ont bénéficié du programme, contre 93 000 étudiants en droit, commerce ou administration. « Seuls 2 % des étudiants du secteur de la santé ont été mobiles grâce à ces échanges européens, alors qu’ils représentaient 12,5 % des étudiants en France pour la même période », regrette le Pr Patrice Diot, président de la conférence des doyens de médecine.
Avec la conférence des présidents d’universités (CPU), les doyens de médecine, de pharmacie, d’odontologie ou de maïeutique, la conférence des CHU et les universités de Berlin ou de Rome, ces universitaires ont lancé début décembre l' «Appel de la Sorbonne », un manifeste pour favoriser une Europe de la santé « innovante, attractive et bienveillante ». Et parmi les trois mesures phares avancées dans le texte, qui a d’ores et déjà été adressé à l’Élysée et à la Commission européenne, figure la mobilité des étudiants en santé sur le continent. « Nous avons besoin de faire des étudiants en médecine, des étudiants européens ! », lance José Manuel Tunon de Lara, président de la CPU et pneumologue de formation.
Des stages inter-CHU européens
Enrichissement personnel, échanges sur les pratiques et les cultures de soins des autres pays, ouverture d’esprit… « Ces voyages permettent à l'étudiant d’acquérir un maximum de bagages pour devenir un professionnel de santé compétent », estime Nicolas Lunel, président de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), associée à l’appel de la Sorbonne. Mais si ces échanges européens attirent si peu les externes, « c’est qu’ils n’ont pas la possibilité de faire des stages dans le pays d’accueil », explique Nicolas Lunel. Les semestres Erasmus se transforment donc rapidement en expérience purement académique pour les carabins, bien loin de la découverte des systèmes de santé de nos voisins.
Pour pallier ce déficit d’attractivité, les signataires de l’Appel de la Sorbonne proposent donc de développer la mobilité en stage, notamment à partir de la 5e année. « Les étudiants ont à ce moment-là validé leurs EDN (épreuves dématérialisées nationales), ils ont le temps disponible pour aller dans d’autres pays européens », souligne le manifeste. En troisième cycle, où les échanges « sont quasi inexistants aujourd’hui », selon Nicolas Lunel, les universitaires appellent à encourager les stages interpays. « Nous savons que pendant l’internat, les mobilités interCHU fonctionnent très bien, constate la Dr Gaétane Nocturne, responsable des mobilités étudiantes à la faculté Paris-Saclay. Nous souhaitons désormais encourager le même type d’échanges entre les différents CHU européens, pour que l’interne puisse faire des stages validants au sein de l’Union Européenne ».
Harmoniser les compétences médicales
Alors que la réforme du deuxième cycle entend replacer les compétences cliniques et relationnelles au cœur de la formation des externes, la Dr Gaétane Nocturne loue « le compagnonnage au lit du malade avec nos étudiants hospitaliers ». « C’est une pratique qu’il faut absolument développer en Europe », insiste-t-elle. Évidemment, derrière cette ambition, l’apprentissage de langues étrangères devient un prérequis. Les signataires souhaitent le rendre obligatoire pour tous les étudiants en santé.
Et, pour aller plus loin encore, « nous souhaitons à terme une harmonisation des compétences médicales à l’échelle européenne », avance Nicolas Lunel, même s'il concède qu’élaborer un socle commun à tous les carabins sera « long et fastidieux ». L’Appel de la Sorbonne va proposer en ce sens à la Commission européenne et aux États membres de créer un groupe de travail sur le sujet. Il pourrait aboutir – ils l’espèrent – à une conférence interministérielle européenne entre les ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur des États membres, pour produire un premier engagement partagé sur ce sujet, au plus tard en 2024.
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