Modulation régionale du numerus clausus, recertification, passerelles, protection maternité : ce qu'il faut retenir de la grande conférence de la santé

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Publié le 15/02/2016
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

La grande conférence de la santé a abouti à une vingtaine de dispositions qui concernent la formation initiale mais aussi les conditions d'exercice.

 

Ouverture de l'accès aux études de santé

 

 

Première mesure : la modulation régionale du numerus clausus national doit permettre d'améliorer la répartition territoriale des médecins. Dès la rentrée universitaire 2016, le numerus clausus sera déterminé au niveau de chaque région en fonction d'une borne minimale (les besoins de santé du territoire) et d'une borne maximale (les capacités réelles de formation). À partir des remontées de chaque « subdivision », le numerus clausus national sera établi par l'Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONPDS). 

La réforme est saluée par l'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF). « Le fait de tenir compte des besoins locaux en médecins est important, nos demandes ont été prises en compte. Il faudra faire attention au risque de régionaliser la formation elle-même, ce n'est pas ce que nous voulons », a précisé son premier vice-président, Maxime Rifad.

Le gouvernement souhaite augmenter les offres de formation accessibles au terme de la PACES mais aussi favoriser les passerelles entre études paramédicales et médicales.

Dès la rentrée 2016, un inventaire exhaustif des formations en santé et sciences de la vie sera établi au sein des universités. Les partenariats avec les écoles, les instituts de formation sanitaire et sociale et les écoles d'ingénieurs seront favorisés afin de multiplier les passerelles entre formations après un échec en fin de PACES.

Par ailleurs, les paramédicaux seront éligibles aux passerelles entrantes en seconde ou troisième année d'études médicales. Une mesure dont s’est réjouie la Fédération des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs (FFMKR), même si elle « s'interroge sur l'application dans les faits ». Un travail sera mené pour préciser les prérequis demandés aux étudiants, en matière d'exercice professionnel notamment.

 

Vers une formation plus professionnalisante

 

Afin de mieux préparer les étudiants à leur exercice, la professionnalisation sera accentuée et la réforme du troisième cycle des études médicales finalisée. Un des enjeux est de valoriser les pratiques extrahospitalières (avec davantage de stages en cabinets de ville), pour que les étudiants puissent construire dès le deuxième cycle leur projet professionnel. Le gouvernement veut aussi rendre plus lisible l'offre de formation des spécialités médicales (suppression des DESC et nouveaux DES) dès les ECN 2017.

La filière de médecine générale sera renforcée. 80 postes de chefs de clinique médecins généralistes sont créés pour 2016 et 2017. Ce point est applaudi par le Syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG) même s'il juge dans l'ensemble que « cette conférence rate l'occasion d'un virage ambulatoire efficace ».

 

Pour une amélioration des conditions d'exercice et de la protection sociale

 

S'agissant des conditions d'exercice, une mesure originale porte sur la prévention des risques psychosociaux (dépression, burn-out, harcèlement). Dès que possible, les Ordres professionnels et les collèges nationaux de professionnels proposeront des modalités pour prévenir ses risques et assurer un suivi individuel des personnels médicaux.

Leslie Grichy, cofondatrice de SOS SIHP, une structure qui permet aux internes des hôpitaux de Paris de parler de leurs problèmes psychosociaux, y voit une annonce « faisable et ambitieuse, qui permet de lever le tabou sur une souffrance dont les médecins ont parfois honte ».

L'extension de l'avantage maternité (réservé aujourd'hui aux PTMG/PTMA) à toutes les femmes médecins de secteur I et celles de secteur II ayant signé un contrat d'accès aux soins, est une réforme attendue de longue date. Cette mesure amorce une réflexion globale sur la protection sociale des professionnels de santé libéraux, promet Manuel Valls. Cette protection maternité sera mise en œuvre dès le PLFSS 2017.

L'annonce a été saluée par le Dr Nicole Bez, chargée de la protection sociale à MG France. « C'est une grande avancée. Nous nous battons depuis plusieurs années pour que les femmes médecins disposent de la même protection sociale que les femmes salariées » a-t-elle déclaré. Mais du côté du BLOC, de l'UFML et de la CSMF Jeunes médecins, on dénonce « une discrimination envers les femmes médecins en secteur II ».

 

La recertification, pomme de discorde avec les médecins seniors

 

Enfin, le chef du gouvernement s'est prononcé en faveur d'une recertification périodique. Réclamée par l'Ordre des médecins, elle se traduira par une labellisation régulière par les pairs des compétences des professionnels de santé (analyse des pratiques et des parcours tout au long de la carrière). Cette réforme (d'ordre législatif) s'appliquera aux nouveaux inscrits au tableau de l'Ordre et aux médecins volontaires. Les outils numériques pourront être utilisés pour cette recertification et l'Ordre en validera l'indépendance.  

La recertification rencontre déjà l'hostilité de la CSMF. « Nous sommes pour une mise à jour régulière des connaissances mais les médecins sont déjà engagés dans le DPC, nous ne voulons pas de la recertification ! C'est une mesure contraignante, qui ignore les efforts déjà consentis par les médecins », juge son président, le Dr Jean-Paul Ortiz.

Marie Foult

Source : Le Quotidien du médecin: 9471