C'était un des décrets les plus attendus des internes depuis un an. En application de la réforme du troisième cycle, le texte publié ce jeudi au « Journal officiel » crée le nouveau statut de docteur junior pour les étudiants de troisième cycle des études médicales qui accomplissent la phase 3 dite de « consolidation » (ultime phase de l'internat). La réforme entre en vigueur à compter de novembre 2020.
À quoi ressemblera ce statut hybride des docteurs juniors ? Premier point : il s'applique à l'ensemble des diplômes d'études spécialisées (DES) disposant d'une phase de consolidation dans leur maquette et ne concerne donc pas aujourd'hui la formation en médecine générale.
Tableau spécial de l'Ordre et autonomie « supervisée »
Concrètement, l'interne ayant validé la phase 2 de sa spécialité (approfondissement), puis soutenu sa thèse – ouvrant droit au diplôme d'État de docteur en médecine – est nommé en qualité de docteur junior par le directeur général du CHU de rattachement. Il s'inscrit (pour la durée de la phase de consolidation) sur un « tableau spécial » à l'Ordre départemental des médecins avant d'être affecté par l'ARS dans son lieu de stage.
Davantage qu'un « simple » interne, mais pas encore tout à fait médecin : les syndicats de jeunes ont longtemps redouté un statut « entre deux eaux », en termes de responsabilité médicale notamment. En réalité, le texte prévoit que le docteur junior exerce son activité (prévention, diagnostic, soins, le cas échéant actes de biologie médicale) « avec pour objectif de parvenir progressivement à une pratique professionnelle autonome ». Sa formation sera suivie sous le régime de l'autonomie supervisée – les actes étant réalisés par le docteur junior « seul », précise le décret.
C'est dans le cadre d'un entretien individuel (avec le praticien responsable du lieu de stage et le coordinateur local de la spécialité) que « la nature, le nombre et les conditions de réalisation d’actes » accomplis par le docteur junior seront décidés.
Pour chaque spécialité, il s'agit de diversifier progressivement la pratique jusqu'à l'autonomie professionnelle complète au regard du référentiel de mises en situation. « La supervision est assurée par un praticien auquel le docteur junior peut avoir recours à tout moment de son exercice, conformément aux tableaux de service, peut-on lire dans le décret. Elle a pour objet le conseil, l'accompagnement dans les actes médicaux accomplis par le docteur junior et la prise en charge d'une situation à laquelle ce dernier ne pourrait faire face en autonomie. »
Côté social, le docteur junior relève du service de santé au travail de l'entité où il accomplit son stage. Il peut être autorisé, à sa demande, à participer au service de gardes et astreintes médicales (après avis du chef de service et information de l'Ordre). Le docteur junior a droit également à un congé annuel de 25 jours ouvrés.
Zones d'ombre sur le clinicat et accès au secteur II
La création du statut de « docteur junior » ne lève pas tous les doutes à ce stade. Pour la CSMF, cette fameuse année de consolidation « doit passer par un investissement financier afin de préserver les postes actuels d’assistants et de chefs de clinique ». Le risque ? « En l’absence d’investissement, le docteur junior pour tous va entraîner le clinicat pour personne », redoute la centrale confédérale, qui s'interroge de facto sur l'accès aux honoraires libres pour les nouveaux spécialistes diplômés. « Docteur junior, un moyen pour fermer le secteur II ? », questionne ce jeudi la CSMF. Le syndicat souligne aussi la nécessité d'ouvrir cette phase 3 des études médicales au secteur libéral (ce qui passe par une maîtrise de stage universitaire ouverte à toutes les spécialités).
Indemnité d'hébergement de 200 euros brut par mois
Quid de la rémunération des docteurs juniors ? Les émoluments forfaitaires mensuels « variables en fonction de l'avancement dans le cursus » seront précisés par arrêté. Une prime d'autonomie supervisée annuelle, versée mensuellement, est aussi prévue.
Parallèlement, un arrêté publié également ce jeudi crée une « indemnité forfaitaire d'hébergement » de 200 euros brut par mois qui sera versée aux internes (dès novembre 2018) et aux futurs docteurs juniors (novembre 2020) lorsqu'ils accompliront un stage ambulatoire situé dans une zone sous-dense et à plus de 30 km de leur centre de formation et de leur domicile.
L'ISNAR-IMG a salué la mise en place de cette indemnité d'hébergement mais milite pour d'autres solutions comme les internats ruraux.
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