Obligatoire ne veut pas dire automatique. Le Pr Dominique Le Guludec, présidente de la Haute autorité de santé (HAS), en a fait l'amer constat la semaine dernière, lors d'un colloque consacré à la sécurité sanitaire.
Depuis mars 2017, établissements et professionnels de santé doivent déclarer sur la plateforme signalement-sante.gouv.fr les événements indésirables graves (EIG) dont ils sont témoins. Les agences régionales de santé sont chargées de faire remonter l'information à la Haute autorité de santé (HAS), qui analyse les causes d'incidents afin de publier des recommandations annuelles.
Les EIG peuvent être liés à des actes de soins, un médicament, un dispositif médical, un produit de la vie courante, un produit cosmétique, une substance ayant un effet psychoactif, un produit de tatouage ou des compléments alimentaires.
On estime que les établissements de santé sont le théâtre de 270 000 à 390 000 EIG par an. Un chiffre très éloigné des remontées de terrain enregistrées en 2017 sur la plateforme de la HAS.
« Nous n'avons reçu que 288 retours d'EIG [exploitables, NDLR] des agences régionales de santé, dont seulement neuf par des médecins de ville, se désole le Pr Le Guludec. C'est peu. Cela montre que la culture de la sécurité n'est pas acquise. » 80% des déclarations proviennent des établissements, dont 66 % des hôpitaux publics.
Cinq natures de risque émergent : les suicides (18 %), les défaillances de diagnostic et retards de prise en charge (15 %), les chutes des patients (14 %), les problèmes opératoires ou techniques (13 %) et les erreurs médicamenteuses (10 %).
Les usagers pharmacovigilants
La plateforme est aussi ouverte aux industriels et aux usagers. Contrairement aux praticiens, les patients se sont bien plus emparés de l'outil. Selon les chiffres présentés par Anne-Claire Amprou, directrice générale adjointe de la santé (DGS, ministère), 60 % des signalements concernent la pharmacovigilance, avec des « pics » liés au Lévothyrox, au stérilet Mirena ou à l'implant Essure.
Le portail de la HAS enregistre également des incidents de santé liés à la sécurité des systèmes d’information. 350 incidents ont été déclarés pour l'instant. « Trois dossiers étaient graves, avec mise en danger de la vie des patients, raconte Philippe Loudenot, chargé de la sécurité des systèmes d’information pour les ministères sociaux. C'était le cas du dysfonctionnement d'un dispositif médical dans un service d'urgences néonatales. »
Pour renverser la vapeur, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a annoncé sa volonté d'élargir en 2019 le champ de signalements de la plateforme aux maladies à déclaration obligatoire, aux infections associés aux soins et aux infections groupées en EHPAD. Pour sensibiliser les professionnels aux vertus de la sécurité sanitaire, chaque signalement sera suivi d'un retour d'information au déclarant.
À Niort, l’hôpital soigne aussi les maux de la planète
Embolie aux urgences psychiatriques : et maintenant, que fait-on ?
« Les Flying Doctors », solution de haut-vol pour l’accès aux soins en Bourgogne
Denis Thuriot (maire de Nevers) : « Je songe ouvrir une autre ligne aérienne pour les médecins libéraux »