DE NOTRE CORRESPONDANTE
L’ÉVOLUTION de l’architecture hospitalière en France et dans le monde, le confort des patients, la conception de l’espace, l’optimisation des conditions de travail des soignants, la sécurité à travers les progrès architecturaux… Autant de questions qui ont été, à Toulouse, au cœur des dernières Rencontres internationales sur la gouvernance des risques en santé. Brigitte Chaline, architecte de formation, programmiste hospitalier, spécialisée dans le conseil aux hôpitaux et aux établissements médico-sociaux, a ouvert les débats en rappelant quelles étaient les orientations actuelles du progrès et les demandes auxquelles elle doit répondre. « Lorsque l’on fait appel à nous dans le cadre de la construction d’un nouvel établissement de santé, la prévention des risques est souvent la première préoccupation, suivie par les questions de confort et des objectifs de continuité de service en cas de catastrophe majeure. Pour répondre à ces soucis toujours plus prégnants de la part des décideurs, nous avons conçu, par exemple, l’hôpital de Strasbourg dans un bâtiment de 180 m de long sans joint de dilatation pour une parfaite résistance à la sismicité », a expliqué la spécialiste.
Autre préoccupation majeure : le confort hôtelier et la question du ratio des chambres individuelles. « Sur ce thème, nous devons nous conformer à la réglementation car certaines activités sont régies par des textes très précis. » Ainsi les services réanimation doivent comporter 100 % de chambres individuelles, l’obstétrique 80 %, la gériatrie peut avoir un maximum de 5 à 10 % de chambres à deux lits. Finalement, ces chambres individuelles sont la garantie du respect de l’intimité des patients et de la confidentialité. Avec elles, la gestion des profils des patients se trouve simplifiée. Reste qu’elles induisent inévitablement une augmentation des surfaces et donc des coûts.
En France, la fonctionnalité et l’ergonomie des bâtiments sont aussi au cœur des préoccupations. Ainsi, les architectes se posent les questions d’accessibilité, de repérage et d’organisation générale des bâtiments : « Nous nous attachons notamment beaucoup à la compacité des circuits, car on sait qu’ils permettent d’alléger les charges de travail des soignants », a expliqué Brigitte Chaline. La spécialiste a enfin pointé des attentes très différentes selon les territoires. « Si les hôpitaux parisiens ont assez peu d’attentes sur les questions de conformité par rapport aux activités, ils restent très soucieux de l’image architecturale. À l’inverse, nous voyons des hôpitaux de province nourrir des attentes élevées, avec le souci permanent d’être à la pointe du progrès. »
La Grande-Bretagne à l’heure de l’« evidence based design ».
Charles Julienne, architecte dans un cabinet anglo-saxon, a présenté, lui aussi, sa vision architecturale des hôpitaux. De l’autre côté de la Manche, il défend une conception aux antipodes de celle qui prévaut dans les établissements de l’hexagone, même parmi les plus innovants…
Imaginez : des chambres individuelles, bercées de lumière naturelle et suffisamment vastes (20 m2 en moyenne…) pour réserver un espace au malade, un autre à la famille, un troisième au personnel. Des équipements multifonctionnels, une ergonomie qui réduirait l’accès aux toilettes, des bâtiments favorisant les unités décentralisées pour réduire les parcours quotidiens des infirmières à 2,9 km par jour (au lieu de 6 km quotidiens dans un hôpital mal conçu… Il ne s’agit pas de la description de l’hôpital de demain, mais de la réalité de nombreux hôpitaux déjà existants et dessinés par ces architectes. « Nous concevons les hôpitaux selon l’evidence based design. C’est-à-dire que nous partons du principe que l’environnement thérapeutique joue un grand rôle dans la réduction du stress, l’accélération de la guérison et la réduction de la mortalité », a expliqué le spécialiste. Il faut dire que dans le système anglo-saxon, les accidents qui surviennent en milieu hospitalier engendrent des pénalités ; et parmi les causes de ces accidents, le lien avec l’environnement (mauvaise signalétique, locaux aveugles…) a été avéré. Voilà pourquoi l’approche architecturale anglo-saxonne privilégie désormais des constructions où l’organisation des soins est totalement centrée sur les patients. Mais quel est le surcoût de telles constructions ? « Ces hôpitaux impliquent un surcoût de 5 %, mais ils produisent une grande valeur thérapeutique», assure Charles Julienne.
Alors pourquoi ne pas construire ce genre d’hôpital chez nous ? Tout simplement parce que nos niveaux de financements actuels ne nous le permettent pas…
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