Relativement épargné pendant longtemps par la pandémie, le Sénégal subit, comme le reste de l'Afrique, une troisième vague sans précédent, due au variant Delta. Dans ce pays de plus de 16 millions d'habitants, où seulement 60 000 contaminations et 1 300 décès avaient été enregistrés jusqu'à présent, les hôpitaux, de la capitale en particulier, sont « proches de la saturation » et le personnel « en burn-out », avait averti la semaine dernière le directeur national des établissements publics de Santé, Ousmane Dia, repris par l'AFP.
Bombe à retardement
À l'hôpital de Fann, à Dakar, le service des urgences dispose de 16 lits équipés d'oxygène. Ils sont tous occupés. Le Dr Babacar Diop, 30 ans, explique qu'il a dû refuser une vingtaine de malades ces derniers jours, qui n'ont pas eu d'autre choix que de tenter leur chance dans un autre établissement ou de rentrer chez eux. Le nombre de décès dus au Covid-19 au Sénégal est sous-évalué, selon le jeune médecin, qui souligne qu'« il y a plus de malades qui désaturent à la maison qu'à l'hôpital ». « Ce variant est une bombe à retardement. On s'en remet maintenant à la prière », ajoute le Dr Diop.
Sur l'ensemble du pays, les contaminations sont passées de quelques dizaines par jour à la fin du mois de juin à un pic de 1 700 en juillet. Mercredi, 11 décès ont été enregistrés et 57 cas graves sont actuellement pris en charge en service de réanimation, selon le ministère de la Santé. Jeudi, près de 900 nouveaux cas ont encore été annoncés.
« Les sujets jeunes sont de plus en plus atteints », souligne le Dr Macodou Mbodji, médecin coordinateur du service de réanimation des patients Covid à l'hôpital Idrissa Pouye, également à Dakar. Son établissement ne manque pas d'oxygène, car il possède sa propre unité de production. Mais les neuf lits en réanimation, réservés aux cas les plus graves, sont occupés. Le taux de mortalité y est d'environ 33 %. « On ne peut pas dire que c'est sous contrôle, la situation risque même d'être catastrophique dans les prochains jours », assure le praticien.
Pendant ce temps, la vaccination s'accélère. D'environ 3 000 par jour, le nombre de doses administrées est passé à 38 000 mercredi, grâce à de nouvelles livraisons de vaccins Sinopharm et Johnson & Johnson. Mais seulement un peu plus de 700 000 personnes ont jusqu'ici été vaccinées.
L'Algérie en manque d'oxygène
En Algérie aussi le variant Delta fait rage. Le pays le plus peuplé du Maghreb (44 millions d'habitants) a enregistré un record quotidien d'infections mercredi 28 juillet, avec 1 927 nouveaux cas, selon le ministère de la Santé. Depuis le début de l'épidémie en février 2020, 168 668 contaminations, dont 4 189 décès, ont été officiellement recensés.
Mais les chiffres officiels - celui des décès en particulier - ne refléteraient pas la réalité, d'après des témoignages de certains professionnels de santé rapportés par les médias. Face à cette troisième vague de la pandémie en Algérie, les autorités ont notamment interdit l'accès à certaines plages et promis d'accélérer la vaccination qui a pris du retard. Près de six mois après le début de la campagne, près de 3,5 millions d'Algériens ont été vaccinés, a précisé jeudi 29 juillet au soir le Premier ministre algérien, Aïmène Benabderahmane.
Mais dans l'immédiat, la priorité est à la pénurie d'oxygène. Des particuliers et certains hôpitaux en manquent en raison notamment de problèmes de gestion des stocks et de distribution. Une entreprise de gaz industriel privée a décidé de dédier une partie de son usine de Blida, à côté d'Alger, à la production et au remplissage de bouteilles d’oxygène médical. Devant l'usine, des citoyens de tous âges, munis d'ordonnances médicales, attendent avec l'espoir de pouvoir obtenir au moins la moitié de la prescription en oxygène. Les bouteilles sont gratuites mais rationnées afin d'aider le plus grand nombre possible de familles en détresse.
Selon des spécialistes de santé interrogés par l'AFP, qui ont souhaité garder l'anonymat, « la production industrielle d'oxygène médical en Algérie couvre largement les besoins hospitaliers », y compris en temps de Covid-19. « Mais les tensions (dans l'approvisionnement) sont le fait d'une mauvaise gestion du circuit de distribution et d'un manque d'anticipation par rapport aux besoins induits par la troisième vague » de la pandémie. Et les grands hôpitaux publics n'ont pas bénéficié de plan prospectif pour remettre en marche ou acquérir des générateurs d'oxygène médical, souligne-t-on de mêmes sources.
Selon le Premier ministre, face à la demande croissante, l'Algérie va importer plus de 160 000 litres d'oxygène ainsi que dix unités de production d'une capacité de 20 000 à 40 000 litres par jour. Elle doit faire venir au moins 15 000 concentrateurs d'oxygène dans les prochaines semaines.
(Avec AFP)
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