Simulation médicale

L’hôpital de Chinon teste un mannequin

Publié le 03/05/2011
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Crédit photo : DR

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LA GESTION des risques par entraînement sur un simulateur fait progressivement son entrée dans les petits hôpitaux. Toute l’équipe de la maternité du centre hospitalier de Chinon, en Indre-et-Loire, a reçu une formation sur un mannequin reproduisant différentes situations à risque. L’occasion de répéter des gestes techniques, et d’apprendre à communiquer. « On réduit la mortalité opératoire de 50 % en communiquant », explique le Dr Bruno Chiron, à l’origine du projet. La check-list opératoire imposée dans tous les blocs depuis 2010 par la Haute Autorité de Santé (HAS) a amené des progrès, sans parvenir à bouleverser certaines habitudes. « Une mauvaise communication est responsable de 80 % des événements indésirables graves », précise le Dr Chiron, anesthésiste-réanimateur, qui a suivi une formation à Paris avant de former à son tour ses confrères.

Le mannequin testé à Chinon parle, respire, tousse. On peut l’intuber, lui prendre le pouls, lui faire une trachéotomie. Plusieurs scenarii sont proposés, par exemple l’hémorragie de la délivrance. « Quand les saignements recueillis dépassent la cote d’alerte, on doit déclencher une séquence de procédures », expose le Dr Chiron. La simulation d’un malaise vagal en service de chirurgie ambulatoire permet de tester la réactivité du personnel infirmier. De même avec l’hématome sous-aponévrotique dans la chirurgie de la thyroïde, une situation exceptionnelle mais très dangereuse. « On regarde si l’infirmier a le réflexe de retirer les fils, les agrafes, les pansements, et s’il appelle correctement le médecin », détaille l’anesthésiste formateur. L’hôpital de Chinon ne veut pas en rester à ce coup d’essai. Il cherche à acquérir un mannequin haute fidélité, dont le coût est élevé. Des tractations sont en cours pour convaincre les tutelles.

Un vecteur d’amélioration des pratiques.

Le coût des mannequins est un frein à leur développement, confirme le Pr Jean-Claude Granry, anesthésiste-réanimateur au CHU d’Angers : « Il faut du personnel dédié et formé pour faire fonctionner les mannequins. Dans mon CHU, qui est l’un des premiers, avec Nice, à avoir ouvert un centre de simulation, nous travaillons deux jours par semaine car nous n’avons pas les moyens de faire plus, mais nous avons une demande très importante. » Les accidents graves se comptent par milliers chaque année en France. « La plupart sont évitables, précise le Pr Granry. La simulation n’est pas la panacée, mais c’est un bon moyen pour améliorer les pratiques. Et pour réduire les temps opératoires : si un interne a appris en simulation à préparer le patient, on gagne un temps fou. » Est-ce utile pour le patient ? Difficile à dire. « Personne n’a pu montrer que les simulateurs ont fait baisser le nombre de crash d’avion, constate le Pr Jean-Claude Granry. Mais quand un interne a fait 50 endoscopies sur simulateur, son geste est plus assuré, et son diagnostic plus sûr. »

La HAS a confié un groupe de travail au Pr Granry et au Dr Marie-Christine Moll, également angevine. Leur rapport sera publié en deux temps : d’abord un état des lieux en mai, puis des propositions, début 2012, pour développer la simulation en santé en France. Via des mannequins ou des simulateurs dits procéduraux, par exemple une simple tête pour apprendre à intuber. La simulation peut aussi s’apparenter à un jeu de rôles filmé, avec des pièges tendus par des acteurs, pour apprendre à mener une consultation et annoncer un diagnostic. L’aéronautique et le nucléaire ont trois longueurs d’avance sur la médecine. « Les pilotes de ligne ont 3 à 4 séances obligatoires de simulation de vol par an, et les employés de la centrale de Chinon s’entraînent 15 jours par an », observe le Pr Granry.

DELPHINE CHARDON

Source : Le Quotidien du Médecin: 8954