Se faire poser une prothèse de hanche à Varsovie, consulter un cardiologue à Stockholm ou choisir ses lunettes à Rome en se faisant rembourser par l'assurance-maladie en France tient encore de l'exploit. Les multiples accords bilatéraux qui facilitent la libre circulation des biens et des personnes ne sont pas « des parcours de santé » et même si le patient européen est de plus en plus tenté par de multiples offres qui présentent aussi des bénéfices touristiques, se faire soigner dans n’importe quel pays de l'Union européenne en conservant tous ses droits n'est pas encore une réalité.
Cela est pourtant en bonne voie, puisque le Parlement européen vient d'adopter en première lecture un projet de directive qui offre la garantie d’un remboursement dans le pays d'origine, à une réserve près, les soins hospitaliers, qui nécessiteront encore une autorisation préalable. Un grand pas franchi, qui permet de mesurer les disparités qui subsistent, au premier rang desquelles ce qui touche aux droits concédés aux patients.
De multiples questions soulevées par l'institut Droit et Santé de l'université Paris-Descartes et la chaire santé de Sciences-Po à l'occasion d'un colloque qui a entre autres permis d’évoquer les avantages et des inconvénients des droits à la sécurité et à la qualité des soins au sein de l’Union. Anne Laude et Didier Tabuteau, codirecteurs de l'institut, soulignent l'avantage que la France a su prendre à travers de multiples initiatives dans le domaine de la recherche clinique et la sécurité des produits, avec, notamment, la mise en place des agences de sécurité sanitaire, dont l'Agence française du médicament, qui a ouvert la voie dès 1993.
Au stade des intentions.
Mais dans d'autres domaines, comme le droit des patients, on en est encore au stade des intentions.René Amalberti, conseiller de la mission Prospective Recherche au sein de la Haute Autorité de santé, reconnaît qu'aujourd'hui « rien n'est fait pour faciliter son développement tant au niveau politique qu'institutionnel ».
Les difficultés à instaurer une réglementation des produits cosmétiques ou bien encore la délicate transposition de la directive concernant la responsabilité des produits défectueux, qui a pris… 15 ans, laissent apercevoir les nombreux blocages qui perdurent. Bien entendu, les 23 langues officielles ne facilitent pas les choses. Les fonctionnaires européens ne montreraient aussi « aucun zèle pour faire avancer ces situations », déplore le directeur général honoraire de la commission européenne, Fernand Sauer, qui estime que « la cour européenne de justice libère les citoyens dans cette course d'obstacles ». Un tiercé qui compte tout de même 497 millions de partants, auxquels rien ni personne ne recommande de réclamer quoi que ce soit en cas d'accident médical.
Pourtant, les recherches de responsabilité se multiplient, compte tenu des 8 % d'accidents sérieux. Les règles d'indemnisation restent encore très hétérogènes et source d'inégalités au sein de l'Union, explique Anne Laude. « Dans le labyrinthe des règles de droit international privé, on distingue désormais clairement les pays dans lesquels on cherche d'abord à savoir si le préjudice était évitable, et ceux qui abordent la question sous un angle plus judiciaire et tendent d'abord à apporter la preuve que les normes en vigueur ont été suivies. » Les cultures s'affrontent et doivent pourtant se conjuguer pour régler des préjudices réels et sérieux. Il n’est pas évident de prendre un avocat en France pour saisir un juge hongrois. C'est pourtant la bonne démarche, puisque le droit du pays où l'accident médical a lieu s'applique. La nouvelle directive prévoit aussi que l'État du lieu de traitement soit tenu d'assurer l'indemnisation du patient. C’est l’une des grandes avancées de ce texte qui permettra peut-être de régler les inextricables litiges liés au manque d'harmonisation des assurances en responsabilités civiles des 10 millions de professionnels de santé européens.
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