LE QUOTIDIEN – L’hôpital ne figure pas (ou plus) au premier rang des préoccupations des pouvoirs publics. Est-ce votre sentiment ?
RACHEL BOCHER – Un seul mot résume l’attitude du gouvernement face à l’hôpital public : rien. On avait l’impression nette que Roselyne Bachelot n’en avait pas grand-chose à faire ; avec Xavier Bertrand, et contrairement à ce que nous attendions, les dossiers s’accumulent et même, certains qui étaient opportunément fermés – je pense à la directive européenne sur le temps de travail – se rouvrent.
Quelles sont les questions en souffrance ?
J’en citerai trois. D’abord l’attractivité des carrières – on est passé de l’annonce en 2007 d’un statut de clinicien hospitalier que j’avais alors qualifié de « bling-bling » au récent rapport Hénart [sur les nouveaux métiers de santé, NDLR] qui déshabille Pierre pour habiller Paul. Ensuite, les praticiens à temps partiel pour lequel on continue d’attendre l’harmonisation des statuts. Et enfin la retraite et les CET [comptes épargne temps] : sur le dossier de la retraite, il y a eu en juillet dernier un protocole totalement insuffisant ; quant aux CET (1,9 million de journées y sont accumulées aujourd’hui), nous demandons une solution pérenne depuis 2007.
Je passe sur la mission Fourcade, qui nous a été présentée comme visant à répondre à nos difficultés croissantes et qui, quand elle nous a auditionnés, ne semblait pas franchement connaître cette loi HPST qu’elle est censée corriger ! Résultat, les mois passent et la barre n’est pas redressée. Le dialogue social est toujours aussi faible, seule l’épreuve de force sera de nature à changer les choses !
Vous y êtes prête ?
Un an après la loi HPST, l’anxiété est majeure. L’hôpital est enfermé dans une spirale de déresponsabilisation, de démotivation et de perplexité qui ne va pas du tout dans le sens de ce que le patient attend de nous. L’institution est devenue le lieu d’une politique de l’enfumage permanent. Mon syndicat n’a jamais été aussi sollicité. Tous les jours, on nous alerte sur des conflits liés à des problèmes budgétaires, des suspensions sauvages qui quelquefois ne sont même pas motivées… Nous sommes vraiment dans le registre de la maltraitance. Nous en devenons défiants vis-à-vis de toutes les procédures. Un confrère vient de me signaler qu’on lui supprimait sans préavis son activité de soins palliatifs…
Sur le terrain, comment fonctionne la gouvernance instaurée par HPST ?
Nous sommes là dans un mélange de tradition réactionnaire anti-public et de faiblesse marquée en matière de culture générale. Il ne faut pas chercher un sens là où il n’y en a pas, et la gouvernance des hôpitaux n’en a aucun ! Des décisions sont ainsi prises qui vont nous coûter plus cher en fin de compte. Même les acteurs qui sont les relais du gouvernement sont ébranlés parce qu’ils ne comprennent pas ce qui se passe.
Tout est approximatif et flou. Le gouvernement pense qu’il peut donner l’impression de traiter les dossiers juste en les évoquant. Il se trompe. Pour notre part, nous avons dépassé la colère, jamais nous ne nous résignerons. Nous ne doutons pas que l’exercice public hospitalier sera au cœur de la campagne de 2012. Il n’est pas question que nous continuions ainsi, sans aucune visibilité, dans l’improvisation au gré de l’humeur des chefs petits et grands. Soigner, ce n’est pas cela !
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