LE QUOTIDIEN : L’hospitalisation privée a vu sa situation se dégrader en 2007, selon les résultats économiques que vous venez de présenter. Comment expliquer ce phénomène ?
JEAN LOUP DUROUSSET : L’application de la T2A a dans une certaine mesure dynamisé l’hôpital public. Ce qui fait que dans certaines villes, il a repris des parts d’activité qu’il avait perdu. Du coup, la situation est devenue préoccupante pour un certain nombre d’établissements privés. On est aujourd’hui sur un niveau de croissance très faible en volume. Les maternités sont stables et le niveau du reste de l’activité chirurgicale est également stable. Notre chiffre d’affaire a faiblement progressé de 1,8 % seulement, alors que nos charges ont évolué beaucoup plus vite. Et du coup on a un resserrement de la rentabilité des établissements. Ce qui se traduit pour ceux qui avaient des résultats honnêtes par une baisse de ces résultats, et pour ceux qui étaient limite-limite, par un passage en négatif.
On comptait donc davantage de cliniques en déficit en 2007 ?
On a un nombre d’établissements dans le rouge inquiétant et on note même une progression sensible : 33 % de cliniques en déficit en 2007 contre 22 % en 2006 et on peut penser qu’en 2008, avec une hausse des tarifs de 0,5 %, la situation va encore se dégrader et que l’escalade va se poursuivre.
Il semble que ce soit les établissements les plus modestes qui souffrent surtout.
C’est cela. Les cliniques qui sont pluridisciplinaires, qui ont une activité diversifiée, qui font de la médecine, de la chirurgie, de l’urgence tirent mieux leur épingle du jeu que les autres, tout comme celles qui sont dans une phase de regroupement.
Mais je trouve que l’on est dans un système paradoxal. Alors que la France consacre beaucoup de ses ressources à la tarification de son système hospitalier - un l’ONDAM de 3,3 % en 2009, ce n’est pas rien, alors que nous sommes dans une crise économique -, les ressources qui ont cru le plus, sont les subventions d’équilibre. Ce qui n’est guère approprié. Au moment où l’on met en avant la rémunération à l’activité, ce qui a augmenté d’abord, ce sont ces subventions. Ainsi, on donne des ressources d’équilibre et on baisse des tarifs. Conséquence, les établissements qui étaient en équilibre redeviennent déficitaires.
L’important, c’est de stopper les déficits des établissements, qu’ils soient publics ou privés. Si les 800 millions d’euros qui ont été consacrés en 2007 à combler les pertes d’exploitations avaient été redéployés sur les tarifs, les hôpitaux et les cliniques s’en porteraient mieux.
Vous demandez donc une augmentation des tarifs ?
On demande surtout une meilleure répartition de la somme qui a été votée par le Parlement. On dit que 3,3 % d’augmentation, c’est largement suffisant pour que le système de santé s’équilibre. En revanche c’est vrai que si on donne surtout aux moins performants, les plus performants ne s’en sortiront pas. C’est un autre paradoxe.
Et les moins performants, ce sont les établissements publics, selon vous ?
C’est majoritairement le public mais ce n’est pas que le public. Les hôpitaux publics ont cependant accusé en 2006, 650 millions de pertes et pour 2007, on parle 800 millions. Peut-être un milliard bientôt. On ne peut pas continuer ainsi. Il faut pas que l’on s’inscrive dans, ce que j’appelle, la culture des déficits, qui consiste à penser que quoi qu’il arrive, les déficits seront comblés.
Pensez-vous qu’aujourd’hui il y a un risque à ce que certains établissements privés mettent la clé sous la porte.
Il y a des établissements qui souffrent. Dans un contexte économique très dur, alors que les banquiers ne sont pas en confiance et les financements sont difficiles à obtenir, les dépôts de bilans ne sont plus à écarter.
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