NI FIASCO, ni succès fulgurant : le rapprochement de deux établissements à Saint-Nazaire, l’un public, l’autre privé non lucratif (ESPIC), est fait d’ajustements, de réunions innombrables. La coopération décidée en 2004 a franchi un cap en septembre, avec l’emménagement dans de nouveaux locaux. La clinique et l’hôpital, reconstruits à neuf, se jouxtent désormais. Le hall d’accueil est commun, le plateau technique, partagé. Un dossier patient unique a été mis en place.
Pour que prenne la greffe, certains secteurs ont été mutualisés : le bloc, la pharmacie, l’unité de chirurgie et anesthésie ambulatoire. Les anesthésistes des deux bords sont réunis dans un même pool. « Nos services sont soit mutualisés, soit complémentaires. Il n’y a pas de concurrence », expose le Dr Philippe Deguiral, président de la CME de la clinique mutualiste. Le président de la CME du centre hospitalier, le Dr Michel Grinand, enchérit : « On s’est mis d’accord sur la répartition des activités. Aucun établissement n’a la possibilité de tondre l’autre ». La clinique faisait appel aux cardiologues de ville, elle demande maintenant leur avis aux praticiens hospitaliers. En retour, les chirurgiens de la clinique se rendent aux urgences de l’hôpital pour dire s’il convient d’opérer.
Une dynamique, des compromis.
Une situation idyllique ? Pas franchement. Chaque jour est fait de compromis : « Les deux équipes ont amené leur check-list au bloc, remarque le Dr Grinand. Il a fallu harmoniser les pratiques. De même pour les protocoles de lutte contre les infections ». Chaque établissement conserve son personnel, son statut, ses instances (les CME prévoient des réunions communes à terme). Les médecins de la clinique mutualiste sont salariés. « Un atout considérable. Ils ne courent pas après l’acte », note le Dr Grinand.
Les deux directions, sans nier les obstacles, saluent la dynamique enclenchée. Patrick Colombel, directeur du CH : « Je ne peux pas dire que cela ne fait pas causer. Ce n’est pas simple mais cela fonctionne. Le management du bloc, par exemple, est partagé par un chirurgien privé et un anesthésiste public ». Catherine Debard, directrice de la clinique mutualiste de l’Estuaire : « Les ressources médicales sont telles que coopérer a du sens plutôt que de se faire la guerre. Ce très bel outil favorise les recrutements. Nous venons de trouver un chirurgien plastique, mais il nous manque deux ou trois anesthésistes ». La coopération n’est pas toujours synonyme d’efficience, nuance la directrice, évoquant la complexe mutualisation des achats.
Le maire (PS) de Saint-Nazaire, Joël Batteux, se dit très satisfait. « Il fallait constituer un pôle puissant pour garder l’offre sur place et réduire les fuites vers Nantes », dit-il.
Sur le terrain, au sein des équipes soignantes, les avis sont plus nuancés. Rachèle Barrion, du syndicat FO, parle d’échec. « On a voulu mélanger l’huile et le vinaigre. Les primes, les plannings, les compétences, les congés, la culture : rien n’est pareil. Les urgences débordent, le personnel est épuisé. Il n’y a aucune marge de manœuvre, on n’aura pas d’embauche. Cela risque d’exploser ».
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