« LE CANARD enchaîné » a raillé cet été les « consultations à prix d’or » facturées aux hôpitaux publics par une kyrielle de cabinets privés. La palme revient aux Hospices civils de Lyon (HCL), qui accueillent l’un des plus vastes chantiers d’amélioration de la performance confiés à des consultants privés. L’opération, financée à coup de millions, porte un nom : « Cap 2013 ».
Piquée au vif, la communauté médicale a mis le sujet sur la table en CME (Commission médicale d’établissement). La direction, priée de se justifier, a dressé un bilan élogieux du contrat de performance reliant les HCL à l’ANAP*. Ce contrat a coûté 2,5 millions d’euros sur la période 2010-2012. Parallèlement, les HCL versent en direct 2 millions d’euros par an aux cabinets de conseil - soit 0,1 % de leur chiffre d’affaires. La démonstration n’a pas convaincu les sceptiques, tel ce praticien, qui dit « ne pas bien voir où va l’argent ». « On ne sait pas le nombre exact de cabinets qui travaillent pour les HCL, ni comment ces cabinets ont été sélectionnés », ajoute-t-il.
Dynamique.
La direction du CHU lyonnais fait valoir que l’investissement « reste mesuré » et « produit des résultats ». Au plan financier, le contrat ANAP a permis une réduction des déficits, une amorce du désendettement et une maîtrise de la masse salariale. Depuis 2010, 32,5 millions d’euros de gains ont ainsi été dégagés.
Au plan médical, la réorganisation des blocs a réduit les dépassements horaires. En biologie, en cardiologie, l’activité se développe et amène de nouvelles recettes. En endoscopie digestive, la « productivité par équivalent temps plein médical » a augmenté de 21 000 euros en deux ans. Une centaine de projets sont terminés ou en bonne voie d’achèvement, 34 sont en retard, et 5 à l’arrêt.
La dynamique de performance enclenchée n’est pas du goût de tous. Au bloc, une PH dénonce le diktat des chiffres et des indicateurs : « Il faut se battre pour que la quantité ne prenne pas le pas sur la qualité des soins ». Un de ses confrères juge les résultats du contrat de performance « très inégaux ». Il n’a notamment pas oublié les conseils prodigués par le cabinet Roland Berger afin d’optimiser la politique d’achats. Le passage aux nouveaux génériques annonçait monts et merveilles. Des centaines de milliers d’euros d’économie. Sauf que... aucun des produits listés (saccharose en solution orale, huile de massage, Myozyme, cérat de Galien...) n’est génériqué, ni même généricable. « Des jeunes tout droit sortis des écoles de commerce font preuve d’une grande incompétence et nous assènent des recommandations absurdes », raille ce PU-PH.
* L’Agence nationale d’appui à la performance hospitalière a été créée en 2009 pour structurer, subventions publiques à l’appui, le marché des consultants gravitant dans le secteur hospitalier. Financée à 92 % par l’assurance-maladie, l’ANAP a dépensé 35 millions d’euros en 2011 (67 % de son budget) pour acheter des conseils à des cabinets privés.
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