La mort d’un nouveau-né sur une autoroute le 19 octobre n’est pas liée à l’existence d’un désert médical ni à un problème d’organisation des soins : c’est ce qu’affirme l’Agence régionale de santé Midi-Pyrénées, dans un bref communiqué.
Bouclée en quelques jours, l’enquête, voulue par François Hollande, et commandée au lendemain du drame par l’ARS, n’est pas rendue publique. Il s’agit d’un « cas personnel » impliquant « la vie privée de personnes ayant vécu un drame particulièrement douloureux », se justifie l’ARS, qui indique que la situation n’appelle pas de mesures particulières. Le rapport a été transmis à l’Ordre des médecins et au Procureur de la république.
Le président PS de la région Midi-Pyrénées, Martin Malvy, demande un audit pour faire le bilan de tous les accidents qui ont pu se produire depuis la fermeture, en 2009, de la maternité de Figeac (transferts en urgence de nourrissons ou de mères vers d’autres structures, accouchements à Figeac au sein de l’hôpital qui ne possède plus de maternité depuis 2009). Selon la CGT santé du Lot, plus de 100 femmes enceintes sur la circonscription de Figeac, chaque année, font plus de 45 minutes pour rejoindre une maternité ; une vingtaine n’y parvient pas.
Pénurie de transports sanitaires dans les campagnes
Le Dr Anne-Marie Bader est responsable du centre de périnatalité à Figeac, mis en place après la fermeture de la maternité afin d’aiguiller les femmes enceintes. Une cinquantaine de patientes par an y sont suivies. Formés aux accouchements inopinés, les urgentistes du petit centre hospitalier ont accouché six femmes au cours des trois dernières années, sans incident particulier. Des jumeaux sont même nés sans encombre. Mais les cas plus lourds se heurtent à la problématique des transports sanitaires, et c’est là tout le combat du Dr Bader : « Nous devons nous battre dans nos petites campagnes pour obtenir un transport de façon à accueillir les accouchements délicats en maternité de niveau 3. À trop fermer de petites maternités, les maternités de niveau 3 se retrouvent encombrées par des accouchements normaux. Qu’il n’y ait pas d’argent et plus de médecins pour rouvrir les maternités de niveau 1 ou 2, c’est une chose, mais alors que l’on développe les transports médicalisés ».
La gynécologue-obstétricien illustre le propos par une histoire qui aurait pu mal se terminer. « J’ai reçu des jumeaux au 7e mois avec une béance du col. J’ai demandé un hélicoptère en urgence à Toulouse, qui m’a été refusé. J’ai gardé la maman, complètement dilatée, en salle d’opération pendant trois jours : le meilleur transport, ça reste le ventre de la mère. Et toutes les 12 heures, je rappelais pour demander un hélicoptère. J’ai fini par en trouver un, venu de Rodez, qui a atterri à Limoges : les enfants ont été césarisés et sauvés ».
L’avenir de la maternité de Decazeville en question
Le Dr Philippe Hélou vit également cette lutte au quotidien, dans la maternité qu’il dirige à Decazeville, dans l’Aveyron. Sa structure réalise 320 accouchements par an ; il la porte à bout de bras depuis 25 ans. Le Dr Hélou a vu quatre maternités fermer dans les environs ces dernières années : deux à Figeac, une à Villefranche-de-Rouergue, une à Rodez. L’avenir de sa maternité lui paraît très incertain. « Pourtant, la proximité est fondamentale, dit-il. En février dernier, une femme qui a fait un hématome rétroplacentaire a perdu son enfant. Les pompiers l’ont emmenée de Figeac vers Villefranche. À la frontière du Lot et de l’Aveyron, il a fallu changer de transport, du temps a été perdu. Le SAMU de l’Aveyron a dit qu’il ne pouvait pas intervenir, il a fallu revenir à Figeac. De Figeac, on l’a renvoyée à Decazeville. Quand la femme est arrivée ici, le bébé était déjà mort. Il aurait pu être sauvé s’il y avait eu une maternité à Figeac ».
Une délégation du comité de défense du centre hospitalier de Decazeville sera reçue au ministère de la Santé le 7 novembre. « Tout l’hôpital est menacé, résume le chef de la maternité. Plusieurs médecins partent à la retraite et les postes ne sont pas renouvelés. C’est avant tout une logique comptable qui dicte les fermetures ; après, on maquille ça avec un problème de démographie médicale. Quand le chef de service défend sa structure, que l’ambiance y est bonne, les médecins viennent y travailler. Dans ma maternité, l’effectif est complet : nous sommes quatre obstétriciens, tous diplômés en France. »
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