LA SANTÉ pour relancer le commerce extérieur ? Nicole Bricq y croit. C’est l’une de ses quatre priorités - avec l’agroalimentaire, le concept de ville durable et la communication.
La ministre s’est rendue au Koweït mi-mars, avec dans sa délégation l’AP-HP (Assistance publique-Hôpitaux de Paris) et Gustave Roussy. Au programme, rencontre avec le vice-ministre de la Santé et visite du Dasman Diabetes Institute, un hôpital ultramoderne. Des contacts ont été établis, des contrats suivront peut-être. Prochain pays sur la liste : le Vietnam. Fin avril, la visite officielle de François Hollande en Chine devrait également comporter un volet santé.
Le signe d’une dynamique nouvelle à l’international ? C’est l’affichage du gouvernement, qui souhaite passer d’une offre éclatée à une approche globale, coordonnée et... valorisée financièrement. La référence mondiale en la matière, c’est l’hôpital Cleveland (Ohio), qui a ouvert des franchises aux quatre coins de la planète.
Accord de licence de marque.
Le NHS britannique vend sa marque à l’étranger depuis des années (voir ci-dessous). L’Institut Gustave Roussy devrait ouvrir la voie en France, avec la signature, a priori fin mars, d’un contrat avec un émirat (Sharjah). Un contrat de niche : l’objectif est d’ouvrir une unité de cancer du sein. Cancérologues, paramédicaux et managers de l’IGR s’envoleront régulièrement pour Sharjah, pour opérer et y former le personnel. « ll s’agit d’un contrat de cinq ans avec un accord de licence de marque », précise Charles Guépratte, le DGA de Gustave Roussy. Plusieurs millions d’euros sont en jeu.
Avec ce premier pied dans le Golfe, l’IGR espère y décrocher d’autres contrats. Le Kazakhstan est visé, qui cherche à structurer son offre en cancérologie. Gustave Roussy veut y devenir le leader. Après l’importation de patients étrangers payants (« le Quotidien » du 21 mars), l’exportation du savoir-faire ? « C’est notre futur en matière de coopération, estime Charles Guépratte. Il est logique que les gens veuillent être soignés à moins de 6 heures d’avion ».
Les hôpitaux publics, eux, ne peuvent créer de filiale commerciale. Vitrine de l’hospitalisation hexagonale, l’AP-HP cherche à s’imposer dans les pays émergents par d’autres moyens. En octobre, elle a signé un contrat avec l’État brésilien du Minas Gerais portant sur l’organisation de la médecine de catastrophe et d’urgence. Tout récemment, l’AP-HP a été sélectionnée par le CHU de Hanoï qui veut s’étendre. L’établissement français va lui proposer un projet architectural et médical. « Nous enverrons une équipe sur place, indique Florence Veber, directrice des relations internationales à l’AP-HP. Nous nous sommes engagés sur un nombre précis de jours de travail ». Pour se distinguer, les hôpitaux de Paris jouent la carte bleu blanc rouge de l’accès aux soins pour tous. « Le modèle américain propose un très bon niveau technique, mais pour des gens qui payent », remarque Florence Veber.
Expertise.
Si le rayonnement de la France est en jeu, l’intérêt est aussi économique. « Cela n’a rien à voir avec l’approche du réseau Esther qui aide les pays pauvres sur le SIDA, note cet interlocuteur. Là, il s’agit d’aider les pauvres hôpitaux français! ». L’IGR vend son expertise pour une prise en charge pointue. L’AP-HP vend des compétences plus larges : organisation du bloc, prévention des infections nosocomiales, management. À une échelle plus institutionnelle, la société privée créée par la Fédération hospitalière de France (FHF), SPH conseil, conseille des gouvernements. Un canton suisse désireux de réviser sa planification hospitalière a fait appel à ses services. Actuellement, SPH conseil accompagne le ministère de la Santé algérien dans l’évaluation de six hôpitaux privés non lucratifs ouverts à titre expérimental.
Le secteur hospitalier privé n’est pas en reste. Jean-Loup Durousset, le président de la FHP, fait des affaires en Russie, en Chine. Son groupe de cliniques Noalys dirige le service d’obstétrique d’un hôpital public à Shanghai. Il devrait se voir confier la gestion de 200 lits au sein d’un immense hôpital franco-chinois en construction. La Chine amène l’essentiel des fonds. Elle a choisi la France pour le management de sa future vitrine hospitalière.
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