LE DÉBAT sur les « PPP » inscrit à l’ordre du jour n’a attiré qu’une dizaine de députés. Face à un Hémicycle dépeuplé, Roland Muzeau, président du groupe gauche démocrate et républicaine à l’Assemblée, s’emporte. « Myopie coûteuse de l’État », « bombe à retardement », « gabegie » : le gouvernement, explique le parlementaire, a eu tort de persévérer dans la voie du PPP, cet outil créé en 2004 qui permet de confier au privé d’importants chantiers publics.
Une centaine de PPP ont été lancés en quelques années, engageant 18 milliards d’euros. Des prisons et des casernes sont sorties de terre, des écoles également. « Les PPP ont permis de gagner une voire plusieurs rentrées scolaires », a souligné Éric Besson, tout en admettant qu’il existe « des cas où les PPP ne sont pas appropriés ». Quid du secteur hospitalier ? Prudent, le ministre de l’Industrie n’a pas eu un mot sur le CH Sud francilien (CHSF). Avant son intervention, Roland Muzeau avait pourtant cité ce projet comme « l’illustration de ce qu’il convient de ne pas faire ». Avec Jacqueline Fraysse, députée communiste, Roland Muzeau demande l’ouverture d’une commission d’enquête sur le CHSF.
Un projet à 1,2 milliard d’euros.
Cet hôpital est le premier à être issu intégralement d’un PPP. Le projet, initié sous Philippe Douste-Blazy, et signé par Xavier Bertrand en 2006, a été décroché par Eiffage. Coût total du projet : 1,2 milliard d’euros. Sa filiale Héveil a conçu et construit l’établissement. Héveil est propriétaire des murs pendant les 30 ans du bail. Problème, les tutelles ont revu plusieurs fois la copie en cours de route. Un exemple : il a été demandé à Eiffage d’ajouter une aile pour l’accueil de patients pénitentiaires, avant de transférer ce service à la Pitié Salpêtrière. Aujourd’hui, le local existe au 4e étage du CH Sud francilien. Une cathédrale de béton immense, qui n’a pas trouvé de nouvelle affectation, et qui pèse sur le loyer que verse l’hôpital à Eiffage. Ces va-et-vient ont alourdi la facture, de même que les 8 000 malfaçons recensées l’an passé, qu’Eiffage a dû corriger. Un contentieux oppose l’hôpital et Eiffage, qui réclame une rallonge de 100 millions d’euros.
Selon Roland Muzeau, l’hôpital serait menacé de cessation de paiement. « L’État, a-t-il asséné en séance, a délibérément renoncé à défendre l’intérêt général ». Le CH Sud francilien a versé 38 millions d’euros de loyer à Eiffage en 2011, grâce à une aide de 30 millions d’euros accordée par l’Agence régionale de santé d’Ile-de-France. Le loyer 2012 serait en cours de négociation. « Les autres hôpitaux d’Ile-de-France n’accepteront pas longtemps que le CH Sud francilien soit maintenu à flot par l’enveloppe MIGAC », prévient le président du conseil de surveillance d’un hôpital voisin.
Alors, faut-il sortir de ce PPP ? L’inspection des finances n’écarte pas la piste : elle propose le rachat de la filiale Héveil par la puissance publique. Trop cher, a tranché Bercy qui a enterré le rapport. « Ce qu’il faut pour baisser le loyer et assouplir la maintenance, estime un proche du groupe Eiffage, c’est renégocier le PPP de façon à ce que l’hôpital devienne propriétaire des cloisons ». Mais le gouvernement, depuis peu, aurait rompu les discussions. À trois mois de l’élection présidentielle, le dossier embarrasse l’exécutif. Le collectif « Sauvons l’hôpital » du CHSF n’exclut pas un appel à la grève courant mars pour porter le débat sur la place publique.
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