Une lettre des caisses à 5 % des médecins

L’Assurance-maladie s’attaque aux refus de soins

Publié le 04/06/2009
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Depuis quelques semaines, des médecins de plusieurs départements de l’Hexagone ont reçu une lettre particulière de leur caisse primaire d’assurance-maladie (CPAM). L’Assurance-maladie a en effet adressé une missive aux 5 % de praticiens du département qui ont la plus faible part de bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) dans leur patientèle. Cette initiative est une action nationale de l’Assurance-maladie. Elle fait suite à la publication du rapport consacré à ce sujet par Jean-François Chadelat en décembre 2006. L’inspecteur général des affaires sociales (IGAS) formulait alors 13 propositions pour réduire le refus de soins des patients CMU. Parmi celles-ci, il préconisait de « mobiliser la CNAMTS et les CPAM dans la recherche et le signalement des refus de soins » et de mettre en place un « suivi de la distribution statistique des 5 % de professionnels recevant le moins de bénéficiaires de CMU pour diligenter une action des délégués d’assurance-maladie ». Deux ans et demi plus tard, c’est enfin chose faite ! Depuis janvier 2007, un groupe de travail a été constitué par la CNAM avec la Haute autorité de lutte contre les discriminations (HALDE), le fonds de financement de la CMU, l’Ordre des médecins et des chirurgiens-dentistes et la Direction de la Sécurité sociale pour apporter une réponse à cette problématique.

Les médecins indignés.

Depuis quelques mois, les CPAM sont chargées d’entreprendre des actions d’information et de sensibilisation des professionnels de santé. Dans chaque caisse, des conciliateurs ont été mis en place pour gérer les réclamations des assurés sociaux et des professionnels de santé. « Les conciliateurs de l’Assurance-maladie sont compétents pour prendre en charge directement le traitement des réclamations des refus de soins formulées par les assurés, comme des difficultés exprimées par les professionnels de santé », indique le courrier adressé aux 5 % de « praticiens atypiques ».

En cas de refus de soins caractérisé, il est prévu que le conciliateur propose au directeur de la CPAM la saisine du Conseil départemental de l’Ordre. Outre son caractère stigmatisant, la lettre adressée à seulement une partie des médecins n’a pas été du goût de ceux qui l’ont reçue. Alerté par des confrères de cette initiative, le Dr Claude Bronner, président d’Union Généraliste, déplore le « manque de tact » de l’Assurance-maladie dans la gestion de ce dossier. Surtout, le généraliste alsacien regrette que l’Assurance-maladie n’ait pas pris autant de soin à appliquer les autres recommandations du rapport Chadelat. Celui-ci appelait les caisses à suivre les déclarations de médecin traitant à chaque ouverture de droit ou de renouvellement CMU et à faire en sorte qu’aucune carte Vitale ne soit délivrée dans un délai supérieur à 15 jours à un bénéficiaire de la CMU. Ce qui n’est toujours pas le cas. « Est-ce la faute des médecins s’ils n’ont pas de CMU dans leur clientèle ? », s’indigne pour sa part le Dr Christian Jeambrun. Le président du SML, indigné, a prévu d’interpeller la CNAM pour dénoncer une initiative qu’il juge « aberrante ».

 CHRISTOPHE GATTUSO

Source : lequotidiendumedecin.fr