En critiquant vertement les méthodes et la communication du Pr Didier Raoult sur la chloroquine, le Dr Damien Barraud s'est attiré les foudres du très médiatique PU-PH marseillais... avant de recevoir le soutien explicite du collectif Fakemed.
Le médecin réanimateur n'y est pas allé par quatre chemins. Dans une longue interview accordée le 11 avril au quotidien local « La Marseillaise », le praticien, qui exerce au sein de l'unité Covid-19 du CHR de Metz-Thionville, dénonce « la médecine spectacle » pratiquée par le Pr Raoult et s'insurge contre les conséquences de ses méthodes à la fois en termes de recherche et d'exercice de la médecine.
L'irruption médiatique du Pr Didier Raoult a « gêné le travail des médecins à plusieurs niveaux », affirme le Dr Damien Barraud. D'abord en créant « beaucoup de palabres et de discussions » entre praticiens, mais aussi dans leur rapport aux patients. Certains « ont demandé parfois de manière très véhémente de prescrire de l'hydroxychloroquine, en nous menaçant de procès si nous ne le faisons pas », témoigne-t-il. « Cette polémique a généré une ambiance pesante, dont nous nous serions bien passés tant le climat était déjà difficile », s'agace le réanimateur.
Braquage scientifique
Mais surtout, le Dr Damien Barraud dénonce le « véritable scandale » que représentent à ses yeux les études du Pr Raoult. « En plus d'être une faillite scientifique, ces travaux sont une faillite éthique », sermonne-t-il. Il blâme une « manière de communiquer à l’encontre du code de déontologie médicale » et tance une méthode d'étude « hors des clous » allant même jusqu'à évoquer « une sorte de braquage scientifique ».
Invité lundi 13 avril de la matinale de RMC, le Dr Damien Barraud en a rajouté une couche évoquant un « populisme médical ». Accusant le Pr Raoult, le réanimateur affirme que « prendre tout le monde en otage et vouloir passer pour le sauveur avec le médicament miracle qui va sauver le monde, en s'asseyant sur toutes les règles méthodologiques et éthiques oui, c'est du populisme médical ».
Passe d'armes
Piqué au vif, l'Institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection dirigé par le Pr Raoult a lancé la contre-attaque. Dans un communiqué à la fois ironique et menaçant publié le 14 avril, l'IHU fait le lien entre les critiques du Dr Damien Barraud et un compte Twitter anonyme accusé de tenir quotidiennement des « injures publiques » et des « attaques diffamatoires ». Le communiqué invite le Dr Damien Barraud à se « désolidariser rapidement » de ces « attaques ». Faute de quoi « elles pourraient justifier une plainte pénale et le lancement d'une procédure auprès de l'Ordre des médecins », menace l'IHU.
Communiqué. pic.twitter.com/Um5JlXySFX
— IHU Méditerranée Infection (@IHU_Marseille) April 14, 2020
Intimidations
Réponse du berger à la bergère, le collectif FakeMed, qui défend une médecine fondée sur les preuves scientifiques, vole au secours du Dr Damien Barraud. Ce groupe de médecins qui a émergé lors de la controverse autour de l'homéopathie s'alarme des « pressions inadmissibles » de l'IHU à l'encontre de leur confrère. Le collectif dénonce le « chantage » de l'IHU « afin de pousser des professionnels de la santé ou de la recherche à se taire ». « La science n'avance pas avec des intimidations », recadre-t-il.
Communiqué du 15 avril 2020
— FakeMed (@fakemedecine) April 15, 2020
La science n'avance pas avec des intimidations pic.twitter.com/OXpG9OUTt9
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