Éditorial

Un PH sur deux

Par
Publié le 07/03/2019
Jean Paillard

Jean Paillard
Crédit photo : S. Toubon

Ce n’est pas parce qu’une femme médecin tient encore les rênes de la santé que tout va bien pour ses consœurs. À vrai dire, Agnès Buzyn n’a elle-même pas caché qu’elle avait été victime d’attitudes sexistes, mais on pouvait en conclure que c’étaient des histoires anciennes, du temps où la ministre était encore en formation… La dernière enquête réalisée à l’hôpital par les syndicats Action praticiens hôpital et Jeunes médecins apporte la preuve que les choses ne se sont pas beaucoup arrangées. Publié à la veille de la Journée des droits des femmes, ce travail confirme d’abord que les médecins au féminin sont encore trop souvent bloqués par ce plafond de verre qui leur interdit l’accès aux postes à responsabilités, alors même que les femmes sont désormais majoritaires parmi les praticiens hospitaliers… D’autres motifs de préoccupations émergent de ce coup de sonde qui souligne que le sexisme n’a pas disparu des études médicales. Et que – comme le révèle le récent ouvrage « Silence sous la blouse » de Cécile Andrzejewski- le harcèlement sexuel n’est pas si rare, puisque 15 % des praticiennes ou étudiantes en auraient déjà pâti.

On dira bien sûr que la santé n’a pas l’exclusivité de ces comportements. La situation hospitalière mérite pourtant qu’on s’y arrête, compte tenu de spécificités qui favorisent la discrimination. Il y a, c’est vrai, cette tradition carabine, qui explique certains excès. Mais cela n’explique pas tout. Pour des raisons qui tiennent en partie au secret médical, l’hôpital est par essence un monde fermé. Et, parce que cela rime avec efficacité et rigueur, il demeure un univers archi-hiérarchisé. C’est enfin un secteur où la notion de sacerdoce reste vivace. Au point que – ce n’est pas le moindre des paradoxes — ce sont parfois les femmes elles-mêmes qui s’interdisent, pour des raisons familiales, de légitimes ambitions professionnelles. Quand il ne s’agit pas tout bonnement d’abandonner leurs droits…

Jean Paillard

Source : Le Quotidien du médecin: 9730