Marcelle, 79 ans, consulte car depuis 3 mois elle présente une toux persistante, et insomniante. Il y a 6 mois de cela, elle a été hospitalisée pour une coronaropathie. Depuis cet épisode, cette dernière reçoit un traitement associant un IEC, un antiagrégant plaquettaire, et une statine. Elle a parlé de cette toux au cardiologue qui l’a consultée un mois auparavant. Ce dernier a décidé d’interrompre le traitement IEC ; mais cet arrêt n’améliore pas la situation. Une radiographie pulmonaire effectuée au décours de son hospitalisation met en évidence sur ce cliché une image hydro-aérique rétrocardiaque qui témoigne de l’existence d’une hernie hiatale (cf. cliché 1).
LA DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE
La toux est un mécanisme complexe qui vise à protéger les voies aériennes et elle est secondaire à une stimulation des récepteurs mécaniques et chimiques retrouvés au niveau pulmonaire, ORL, et digestif.
→ Trois types de toux sont classiquement définis :
- La toux aiguë (moins de semaines).
- La toux subaiguë (entre 3 et 8 semaines).
- La toux chronique (au-delà de 8 semaines).
→ L’interrogatoire permet dans un premier temps de connaître un éventuel tabagisme du patient (à l'origine d'une inflammation chronique).
La BPCO due au tabac atteint près de 17 % des fumeurs, et 10 % des anciens fumeurs. On recherche des facteurs personnels (atopie) ou professionnels (exposition à des produits toxiques) qui peuvent avoir un retentissement sur l’appareil bronchopulmonaire.
On détermine la nature de la toux (sèche ou productive), le caractère insomniant (cas de l’insuffisance cardiaque) ou non, saisonnier (rhinite allergique), la toux matinale de la BPCO et post-prandiale du RGO. La description de l’expectoration est parfois utile : elle est perlée et muqueuse dans l’asthme, saumonée dans l’IC, et purulente dans les dilatations des bronches. Il est tout aussi important de connaître les traitements du patient. Entre 5 et 35 % des patients ayant un traitement par IEC ont une toux sèche au décours de ce traitement.
→ L’examen clinique est une étape clé pour déterminer la présence de sibilants dans les champs pulmonaires, de crépitants à la base des poumons (dans les IC).
Au niveau ORL, on recherche un jetage postérieur témoin d’un problème rhinopharyngé, une anomalie au niveau du conduit auditif externe, mais aussi des polypes au niveau de la trachée.
→ La radiographie pulmonaire permet de donner des informations concernant les étiologies responsables de cette symptomatologie (cf.encadré E1).
■ Si la radiographie est pulmonaire pathologique, plusieurs étiologies doivent être évoquées :
- Le cancer bronchique primitif est évoqué chez tout patient fumeur. Une hémoptysie est parfois associée à la toux.
- La tuberculose pulmonaire associe une altération de l’état général.
- La dilatation des bronches s'associe à des expectorations purulentes.
- Les pneumopathies interstitielles chroniques d’origine infectieuse, néoplasique ou systémique.
- L’insuffisance cardiaque gauche donne au niveau du cliché une cardiomégalie, et des signes de stase pulmonaire (les lignes de Kerley).
- Chez la personne âgée, penser aux pneumopathies de déglutition.
■ Quand la radiographie est normale, penser à :
- L’asthme qui associe des oppressions thoraciques, sibilants, et dyspnée. La confirmation diagnostique est apportée par la spirométrie (obstruction bronchique réversible sous β2 stimulants).
- Le syndrome de la toux chronique des voies aériennes supérieures secondaire à plusieurs causes : polypes naso-sinusiens, rhinite allergique, laryngite chronique, affection du conduit auditif externe, dysfonction des cordes vocales.
- Le RGO. Typiquement on retrouve le pyrosis, mais la toux peut être au 1er plan. Pour les formes évoluées (cas de notre patiente), la radiographie peut être anormale. Un bilan digestif (manométrie et fibroscopie) doit être réalisé et un traitement d’épreuve par IPP est institué.
- La BPCO. On la définit par une toux et expectoration au moins 3 mois par an durant 2 ans.
- La cause iatrogène : IEC, β bloquants, inhibiteurs calciques. - La cause post-infectieuse secondaire à une irritation des voies aériennes supérieures.
- La bronchite à éosinophiles secondaire à une inflammation des voies aériennes.
- La cause psychogène qui nécessite un suivi pour ne pas passer à côté d’une autre étiologie.
LE CAS DE MARCELLE
En fait, son RGO - présent de longue date, mais qui ne se manifestait pas - a été aggravé par le stress induit par l’hospitalisation, mais aussi par le fait que cette patiente s’est alcoolisée au décours de cet événement.
La prise en charge de ces facteurs majorant le RGO, et l’administration d’un IPP ont permis une amélioration clinique.
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