Annals of internal Medicine Effets de la diminution de la pression artérielle chez les patients atteints d’hypertension légère. Revue systématique et méta-analyses [Effects of Blood Pressure Reduction in Mild Hypertension. A Systematic Review and Meta-analysis. Sundström J, Hisatomi A, Jackson R et al, on behalf of the Blood pressure lowering treatment trialist’s collaboration (BPLTTC)]. Ann Intern Med. Published online 23 December 2014 doi:10.7326/M14-0773.
CONTEXTE
Les bénéfices cardiovasculaires des médicaments qui diminuent la pression artérielle (PA) des hypertendus sont solidement documentés. Cependant, ils sont moins bien établis (1) chez les patients atteints d’hypertension légère et indemnes d’antécédent et/ou de signes cliniques de maladie cardiovasculaire (prévention primaire).
OBJECTIF
Mesurer le bénéfice du traitement antihypertenseur sur les événements cardiovasculaires et les décès chez les patients hypertendus légers en prévention primaire.
MéTHODE
Il s’agit d’une méta-analyse des essais randomisés présents dans la base de données de la BPLTTC (Blood Pressure Lowering Treatment Trialists' Collaboration), plus ceux identifiés dans une précédente revue systématique (2), plus ceux collectés par une recherche exhaustive de la littérature. Ces essais devaient concerner des patients hypertendus légers (PAS 140-159/PAD 90-99 mmHg) en prévention primaire traités versus placebo (ou traitement minimal) d’une durée › 1 an. La méta-analyse a « poolé » les données individuelles de la base BPLTTC et les données agrégées puis individualisées des autres essais. Les risques de biais ont été mesurés à l’aide de l’outil d’évaluation de la Cochrane collaboration. Les critères de jugement étaient les événements cardiovasculaires (AVC fatal ou non, infarctus fatal ou non, hospitalisation pour insuffisance cardiaque), les décès CV et la mortalité toutes causes. L’analyse statistique a été faite sur données individuelles avec un modèle de régression logistique à effet mixte double niveau.
RÉSULTATS
Les données de 13 essais ont été incluses regroupant 7 842 patients dans le groupe traitement actif et 7 424 dans le groupe témoin. Ils étaient âgés en moyenne de 63,5 ± 8,4 ans. La durée médiane des essais était de 4,4 ± 0,5 ans. En fin d’essais, la différence était respectivement de - 3,6 mmHg pour la pression systolique et de - 2,4 mmHg pour la diastolique dans le groupe traité versus le groupe témoin.
› Il n’y a pas eu de différence entre les groupes sur l’ensemble des événements CV : OR = 0,86 ; IC95 % = 0,74-1,01, sur les événements coronaires : OR = 0,91 ; IC95 % = 0,74-1,12, ni sur les hospitalisations pour insuffisance cardiaque : OR = 0,80 ; IC95 % = 0,57-1,12.
› En revanche, il y a eu significativement moins d’accidents vasculaires cérébraux : OR = 0,72 ; IC95 % = 0,55-0,94, de décès cardiovasculaires : OR = 0,75 ; IC95 % = 0,57-0,98, et de décès toutes causes confondues : OR = 0,78 ; IC95 % = 0,67-0,92.
Il y a eu davantage de sorties d’essai pour effet indésirable dans le groupe traitement actif que dans le groupe témoin.
› Au total, une réduction pharmacologique modeste de la PA chez des patients hypertendus légers en prévention primaire diminue significativement l’incidence des AVC et des décès.
COMMENTAIRES
Ce travail est intéressant pour la médecine générale à deux titres :
› Il concerne la population d’hypertendus la plus fréquente (3-4), et en France, 94 % de ces patients sont exclusivement soignés par un médecin généraliste.
› D’un point de vue méthodologique et biostatistique, il est judicieusement conduit.
La précédente méta-analyse sur le même sujet (8 912 patients) avait abouti à des résultats négatifs (2). L’intérêt principal de celle-ci est d’avoir inclus suffisamment de patients (15 266) pour avoir une puissance statistique susceptible de détecter des différences que les petits essais qui la composent ne pouvaient pas observer. Sa principale faiblesse est le petit nombre d’événements survenus, ce qui s’explique par un risque cardiovasculaire absolu des patients à 10 ans (Framingham) bas (10 %), et ce qui explique les intervalles de confiance à 95 % des odds-ratio relativement larges.
Une autre faiblesse de cette méta-analyse est le mode de mesure de la pression artérielle faite au cabinet à l’aide d’un appareil conventionnel à l’époque. Aujourd’hui, le diagnostic d’hypertension doit reposer sur l’utilisation d’un appareil électronique au cabinet et sur des mesures électroniques ambulatoires(5).
› En pratique, un médecin généraliste voit 15 patients hypertendus par semaine, dont 50 % sont des hypertendus légers en prévention primaire à bas risque cardiovasculaire (4). La méta-analyse de la BPLTTC (groupe indépendant de chercheurs qui fait référence dans le monde), montre qu’il y a un bénéfice clinique réel, mais modeste à abaisser leur PA.
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