Bernard, 64 ans, consulte car il présente, depuis quelques semaines, une gêne au niveau de la hanche droite.
Parmi les antécédents du patient : il y a deux ans, en accord avec l’uro-oncologue, il avait choisi l’option de la surveillance active dans le cadre d’un cancer de la prostate très limité, de petite taille et totalement asymptomatique.
Compte tenu des antécédents du patient et de la symptomatologie à l’origine de la consultation, une radiographie de la hanche droite a été effectuée.
Cet examen a permis d’objectiver une lésion ostéolytique vers la tête du fémur droit qui a conduit à la réalisation d’une IRM de la hanche.
Cette exploration a mis en évidence une lacune intramédullaire ovoïde bien délimitée sur l’extrémité supérieure du fémur droit qui fait penser à une plage ostéolytique.
En raison des antécédents du patient, une biopsie de cette lésion est réalisée.
L’examen anatomopathologique permet de poser le diagnostic d’enchondrome.
(Et parce que certains cas cliniques sont complexes, les différentes explorations complémentaires ont révélé que la douleur ressentie au niveau de la hanche droite n’était pas en rapport avec l’enchondrome mais avec une ostéonécrose de la tête fémorale du fait de l’hypertension et du diabète du patient).
INTRODUCTION
L’enchondrome est une tumeur bénigne ostéolytique qui est observée au niveau de la métaphyse des os longs ou courts. Cette tumeur de la famille des hamartomes provient de cellules cartilagineuses aberrantes (elles sont composées de cartilage hyalin bien différencié).
Parmi l’ensemble des tumeurs cartilagineuses, l’enchondrome est la plus fréquente après l’ostéochondrome.
Cette formation est surtout mise en évidence chez les patients ayant entre 30 et 40 ans.
Dans 40 à 65 % des cas, l’enchondrome est objectivé au niveau des os de la main (phalanges surtout) et, dans 25 %, au niveau des os longs (le plus souvent au niveau du membre supérieur).
L’os iliaque est peu concerné par cette tumeur (moins de 3 % des cas).
On a identifié deux pathologies présentant des enchondromes multiples : la maladie d’Ollier (prévalence d’environ 1/100 000 habitants), non héréditaire, avec de multiples enchondromes asymétriques, et la maladie de Maffucci, avec de multiples enchondromes et hémangiomes des tissus mous.
La découverte de l’enchondrome est le plus souvent fortuite et, dans 10 % des cas, fait suite à la réalisation d’une imagerie dans le cadre d’un traumatisme.
SYMPTOMATOLOGIE ET DIAGNOSTIC
Sur un plan clinique, les enchondromes sont fréquemment asymptomatiques, sauf en cas de fracture pathologique (liée à une fragilisation osseuse).
Parmi les différents examens complémentaires, on peut citer :
• la radiologie standard, qui objective une lacune intramédullaire bien limitée avec des contours polylobés, et parfois des calcifications floconneuses au centre de ces formations (elles ont une forme d’arc ou d’anneau). La corticale osseuse est parfois soufflée (érosion du versant endostéal de la corticale osseuse), mais rarement rompue,
• l’IRM, qui met en évidence une lésion lobulaire ayant un aspect de lacune et un contenu de type pseudo-liquidien. On note parfois aussi des calcifications annulaires,
la scintigraphie, qui objective fréquemment une hyperfixation qui peut être confondue avec une lésion maligne,
• l’examen anatomopathologique, qui met en évidence des lobules de cartilages hyalins matures séparés par des septa fibroconjonctifs. Des plages de calcification sont parfois observées au sein de la matrice cartilagineuse.
PRISE EN CHARGE
Il est important de souligner qu’une transformation maligne d’un enchondrome en chondrosarcome est exceptionnelle (moins de 1 % des cas), sauf dans le cas des enchondromatoses (20 % des cas).
De ce fait, le plus souvent, il est conseillé de s’abstenir de tout geste chirurgical.
Cependant, dès lors qu’il existe un doute sur l’origine de cette tumeur ou que les risques de fracture sont importants, il est possible d’effectuer une exérèse de l’enchondrome.
Ce traitement chirurgical est associé à une greffe osseuse au niveau de la zone atteinte.
Dr Pierre Francès (médecin généraliste à Banyuls-sur-Mer), Tara Chalaye (interne en médecine générale à Montpellier), Julie Aguilar et Victor Chenal (externes à Montpellier)
BIBLIOGRAPHIE
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